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du commandement suprême. Enfin l’acte fédératif du 8 juin 1815 n’est qu’une dépendance du traité de Vienne, signé le 9 juin, et où l’on en retrouve textuellement toutes les dispositions générales. Celles-ci se trouvent donc placées sous la garantie des puissances signataires du traité de Vienne, source de protection sans doute pour le cas où l’existence de la confédération serait mise en danger, mais bien plutôt source de difficultés continuelles, soit que la confédération médite quelque notable réforme dans sa constitution intérieure, soit qu’elle veuille modifier son étendue et ses limites sur le sol même des provinces non allemandes qui appartiennent à une puissance faisant partie de l’union. À ce compte, la confédération germanique ne peut pas être envisagée uniquement comme une association libre de certains états créée seulement par leur volonté, et pouvant par conséquent se transformer par une simple résolution de leur part ; elle est le résultat d’un traité européen, et forme un élément de l’organisation générale de l’Europe réglée et fixée par ce traité, de telle sorte que nul état allemand ne peut apporter de changemens essentiels à son caractère national ni à l’étendue de son territoire sans le consentement et le concours formel de toutes les puissances signataires du traité général de Vienne. C’est ce que l’Angleterre et la France n’ont pas manqué de rappeler énergiquement à l’Allemagne en plus d’un cas.

Tels sont quelques-uns des principaux vices de la constitution germanique. Au nom de ces vices, on l’a bien souvent attaquée ; après 1848 même, on a pu croire à sa ruine complète. Le dualisme qui divise l’Allemagne, l’ambition des puissances secondaires, l’unitarisme enfin, sont autant de causes d’affaiblissement pour la constitution de 1815, et cependant elle a résisté sans cesse ; à peine détruite un instant, on l’a vue bientôt revivre. Bien plus, cette constitution, si défectueuse par certains côtés, a réédifié l’Allemagne ; elle lui a rendu la paix et l’honneur après une longue période d’humiliation et de division intestine ; elle lui a donné assez d’unité pour empêcher le retour d’éventualités funestes, comme l’entente de quelque puissance allemande avec des souverains étrangers en lutte avec l’Allemagne, comme la perte de quelque province cédée à l’ennemi, ou comme la guerre civile. La raison de ses bienfaits et de ses faiblesses doit être cherchée dans sa conformité avec le génie allemand. Il ne faut pas demander à une constitution politique et sociale d’être différente de l’esprit du peuple qu’elle est appelée à régir ; elle ne saurait lui être ainsi une chose extérieure sans perdre sa vraie signification et son utile influence : il faut que ce peuple reconnaisse en elle ses principaux traits, l’expression de son caractère et celle de ses mœurs ; sinon, il la renie comme une œuvre