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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 39.djvu/499

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sieurs projets de loi annoncés au début de la session. La chambre a repoussé cette proposition d’ajournement, qui était par trop timorée, et dont au surplus l’espoir du rétablissement du roi est venu heureusement faire disparaître le prétexte.

Tout annonce que nous allons enfin assister à la conclusion d’un des épisodes les plus bizarres de la vie politique intérieure de l’Allemagne, nous voulons parler du conflit dont la Hesse électorale était depuis tant d’années le théâtre. L’électeur, par ses dernières incartades, a réussi enfin à perdre la protection de l’Autriche et de la majorité de la diète, qui lui permettait de résister depuis quinze ans aux vœux imperturbables de ses persévérans sujets. L’Autriche s’est mise d’accord avec la Prusse pour conduire à une solution la question hessoise. L’électeur a refusé de recevoir l’aide-de-camp du roi de Prusse, le général Willissen, que le roi Guillaume lui avait envoyé ; mais, s’il ne devient pas plus traitable, il faudra bien qu’il cède à l’exécution fédérale. Lorsqu’on se rappelle qu’il y a douze ans cette question hessoise faillit allumer la guerre entre la Prusse et l’Autriche, on ne peut s’empêcher de reconnaître encore ici la supériorité de la sage et libérale politique de M. de Schmerling sur les entraînemens impétueux et violens de la politique réactionnaire du prince Félix Schwarzenberg. Mais la principale crise de la politique allemande n’est point aujourd’hui dans la Hesse électorale, elle est au cœur même de la Prusse. La Prusse a répondu à l’appel que le roi lui avait adressé par la dissolution en nommant une chambre où les élémens progressistes et libéraux sont plus considérables que dans la précédente assemblée. Devant le résultat des élections comparé au langage tenu par le roi en plusieurs circonstances, on s’est demandé avec inquiétude en Allemagne et en Europe si l’on n’allait point assister à un conflit entre les prétentions populaires et la prérogative royale. Nous n’avons point partagé cette crainte. Il nous semblait qu’en Allemagne il était peu probable que les conséquences d’une situation complexe se pussent déduire avec la logique inexorable que d’autres peuples apportent dans la vie politique. Ni de la part du roi et. d’un prince de la maison populaire de Hohenzollern, ni de la part du peuple prussien, il ne nous paraissait probable que les choses fussent poussées à l’extrême. Ne serait-ce point un contre-sens absurde que le roi de Prusse, comme le voulaient les alarmistes, se préparât à comprimer par un coup d’état les aspirations nationales au moment même où à Cassel le gouvernement prussien allait faire prévaloir, au besoin même par la force, les vœux et les droits populaires contre l’obstination d’un petit despote? Nous croyons que notre espérance ne sera point trompée. On paraît être d’accord en Prusse pour éviter le conflit. Nous pensons que la nouvelle chambre ne sera convoquée que pour expédier dans une courte session les affaires urgentes, et que l’on prendra grand soin d’écarter par des ajournemens prudens les luttes de prérogatives.