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brille de son éclat métallique dans sa gangue pierreuse et cristalline, et la roche se présente à l’œil sous le véritable aspect que la nature lui a donné. Les travaux des Étrusques se terminent sur la cime ; du Monte-Calvi, où deux vastes puits, mesurant chacun plus de cent mètres en profondeur, marquent la limite de cette antique exploitation. En quelque point qu’on la visite, elle étonne par son immensité même, et des chambres aux gigantesques proportions vont se succédant, communiquant entre elles par d’étroits boyaux. Ceux-ci se prolongent quelquefois jusqu’à la surface comme des ; cheminées d’aérage destinées à ventiler les travaux. Autour des chambres, dont la hauteur effraie presque le visiteur, sont disposés des massifs en gradins sur lesquels s’élevaient les ouvriers pour l’abatage du minerai. Nous montâmes sur ces larges marches et visitâmes en détail la partie supérieure des chantiers. Pour ne pas nous égarer dans ce dédale, nous fixâmes de loin en loin des chandelles allumées, qui nous servirent au retour pour retrouver notre chemin. Rien ne saurait dépeindre la majesté que ces souterrains empruntent à leur silence et à leur immensité, et le bruit monotone de l’eau s’échappant des parois à intervalles réguliers trouble seul le calme de cette étrange solitude. Aucun son du dehors ne pénètre, et les animaux eux-mêmes qui cherchent un abri dans ces cavités ne s’aventurent guère dans l’intérieur. Retenus par une espèce d’effroi, les rats et les chauves-souris s’établissent prudemment à l’entrée des galeries, et ne poussent pas plus loin leur visite intéressée.

Quelquefois l’ampleur des vides inquiétait les mineurs eux-mêmes, et ils remblayaient et soutenaient alors une partie de leurs chantiers par des roches stériles et des étais en bois que l’on retrouve encore aujourd’hui en place. Les moellons, au milieu desquels on jetait de la terre ou du sable, ont formé une espèce de béton dur comme le ciment romain, et que l’on ne peut plus détruire qu’à la poudre ; les bois se sont en partie carbonisés, mais non pourris. L’eau qui arrive dans ces vides par les fissures du sol traverse un terrain de marbres. Elle se charge de parties calcaires, et, filtrant goutte à goutte dans les excavations, dépose au toit et au seuil des galeries des aiguilles et des stalactites qui finiront par se rejoindre. Les atomes de carbonate de chaux se reforment un à un à mesure que l’eau s’égoutte ou s’évapore lentement. Cependant quelques-unes de ces colonnes cristallines mesurent déjà plusieurs mètres de hauteur, et ces faits nous démontrent que le temps comme nous le comprenons n’est guère un élément avec lequel compte la nature dans les œuvres qu’elle se plaît à créer.

Les mines que les Étrusques ont exploitées à Campiglia sont des