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lui pour le prier d’appuyer des réclamations importantes qu’ils présentaient sans succès depuis longues années. Le consul-général de Belgique, M. de Lannoy, se plaça sous son patronage pour faire assurer à son pays les avantages commerciaux qui avaient été accordés à l’Angleterre, à la France et aux États-Unis par les traités récemment conclus. Je ne crois pas sans intérêt de citer ici la réponse adressée par Ki-yng à M. de Lagrené au sujet de l’affaire belge :


« Ki, réponse respectueuse. — Ces temps passés, je vous ai successivement écrit plusieurs lettres incultes dont je suppose que vous aurez pris connaissance en leur temps. J’ai reçu naguère la lettre fleurie que vous m’avez adressée de Manille, par laquelle j’ai appris que votre voyage avait été heureux, et que vous jouissiez d’une paix non interrompue, ce qui m’a causé une joie et une consolation indicibles.

« Le consul-général de Belgique Lannoy demande l’application des traités de commerce. En. soi, la chose est très bonne, et survenant la recommandation de votre noble grandeur, à combien plus forte raison ne dois-je pas accorder ce que l’on demande ! Mais le royaume de Belgique n’ayant pas commercé avec la Chine depuis une longue série d’années, les relations commerciales qu’il vient établir maintenant avec cette province doivent être regardées comme une nouveauté sur laquelle il est absolument nécessaire d’adresser une claire représentation à notre grand empereur, en le priant de donner une décision selon son bon plaisir. C’est là, pour la Chine, une loi invariable que je n’oserais pas enfreindre. Maintenant je réponds au susdit consul d’attendre paisiblement à Macao, tandis que d’autre part j’adresse une pétition à l’empereur, et lorsqu’arrivera la nouvelle des bienveillantes volontés impériales, je les ferai connaître au consul en même temps que je lui remettrai une copie respectueuse du traité récemment conclu pour les cinq ports. Quant à moi, je pense que, notre grand empereur ayant une extrême bienveillance pour les gens du lointain, il doit, sans le moindre doute, accorder ce que l’on demande. Je vous écris cette réponse en vous souhaitant un heureux voyage et un prompt retour, afin que nous ayons le plaisir de nous entretenir longuement. »


On voit combien la recommandation de M. de Lagrené avait de. poids auprès des autorités chinoises. Jusqu’aux derniers momens de son séjour, les circonstances lui donnèrent lieu d’exercer l’influence qu’il s’était acquise sur l’esprit du commissaire impérial. Il en profita surtout pour apaiser les conflits que soulevait l’application de l’édit sur le christianisme. L’édit ne concernait et n’avait en vue que les chrétiens chinois, qu’on s’interdisait de poursuivre ou d’inquiéter à raison du culte professé par eux. Les missionnaires étrangers restaient soumis à la loi commune ; ils ne pouvaient être admis que dans les cinq villes de Canton, Amoy, Ning-po, Fou-tchou-fou, Shang-haï ; s’ils pénétraient dans l’intérieur du pays, ils devenaient passibles d’un article du traité de Whampoa, stipulant