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s’explique très bien par l’histoire. Nul n’ignore en effet quelle prépondérance les empereurs d’Allemagne ont gardée pendant tout le moyen âge sur l’Italie du nord et du centre. Il n’y aurait rien d’étonnant aussi que la grande comtesse Mathilde, qui possédait le marquisat de Toscane dans la deuxième moitié du XIe siècle, ait appelé des mineurs allemands-, car elle épousa successivement deux princes d’Allemagne. Le produit des mines dut même former une partie notable de ses immenses revenus.

Quelles causes amenèrent la cessation de travaux si productifs, et comment des exploitations si prospères furent-elles interrompues sans retour ? Les motifs d’un tel abandon sont nombreux, et parmi les faits principaux qui entraînèrent, vers le milieu du XIVe siècle, la fermeture successive de toutes les mines toscanes, il faut d’abord citer les guerres intestines. Ainsi Massa succombe en 1346 sous les coups répétés de la république de Sienne, et avec la chute de la liberté, suivie de l’exil volontaire ou forcé des plus riches familles, périt également la grande industrie massétane. Il ne faut pas oublier non plus les déprédations de hardis condottieri qui portent dans les lieux qu’ils ravagent le vol et l’incendie, et offrent aux mineurs venant se mettre à leur solde un gain plus élevé et une occupation plus attrayante. Les pestes et les famines, faisant irruption coup sur coup et se succédant comme à l’envi, concourent pour une part encore plus large au dépeuplement du pays, et achèvent d’enlever au travail des mines le peu de bras qui restaient disponibles. La peste de 1348 fut surtout terrible ; c’est celle qu’a décrite Boccace dans le Décaméron, celle qui, sous le nom de peste noire, fit le tour de l’Europe, semant partout l’épouvante et la mort. C’est depuis cette époque que la Maremme a perdu presque tous ses habitans. De vingt mille âmes qu’elle avait, Massa tomba au-dessous de mille. Les campagnes, jusqu’alors si fertiles, se dépeuplèrent, et les maquis envahirent de nouveau les terrains jadis productifs. Aujourd’hui encore on rencontre au milieu des hautes broussailles des oliviers devenus sauvages, et l’ordre dans lequel se succèdent les arbres rappelle seul l’ancienne culture. Des ruines nombreuses de villages et de châteaux couvrent aussi ces lieux changés en déserts. Enfin la malaria, dont la première apparition dans la Maremme remonte au IVe siècle après le Christ, puisque Sidoine Apollinaire, appelé de Lyon à Rome, nous dit dans ses lettres qu’il prit les fièvres en traversant l’Étrurie, la malaria étendit encore plus ses ravages à mesure que dans les champs les bruyères remplaçaient la moisson. La Maremme acheva de se dépeupler, et il faut arriver jusqu’à notre. époque pour assister à une reprise des mines massétanes et à un commencement de régénération de ces malheureuses contrées.

À des événemens déjà si tristes vinrent se joindre des circonstances