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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 40.djvu/58

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neurs de cette vaste construction ; mais si l’ensemble des recettes dépasse 400,000 livres sterling, MM. Kelk et Lucas recevront en outre 100,000 livres de la même monnaie. Ces 300,000 livres sterling ne représentent guère encore que le loyer de l’édifice pendant six mois. Cependant les entrepreneurs seraient alors obligés d’abandonner à la Société des Arts (Society of Arts) une partie des galeries de peinture. Tout le reste leur appartiendrait ; ils seraient libres d’abattre l’édifice et d’en vendre les matériaux, à moins que les commissaires ne veuillent s’en saisir. Ces derniers se sont en effet réservé le droit d’acheter le monument et de désintéresser les entrepreneurs en leur payant une dernière somme de 130,000 livres sterling, — en tout 430, 000, J’appuie sur ces détails, afin de montrer la puissance du crédit anglais : d’un souffle, il remue les pierres, élève un palais à une idée, et abrite sous un toit de verre tous les chefs-d’œuvre de l’industrie humaine.

À peine ce contrat fut-il passé entre les commissaires et les entrepreneurs, que les projets affluèrent pour la construction du monument. La proposition de prendre pour modèle le palais de 1851 fut écartée à cause du caractère de permanence qu’on voulait imprimer au bâtiment de l’exhibition pour 1862. Le verre et le fer peuvent bien suffire à élever pour six mois un de ces palais de fée qui paraissent et disparaissent dans l’histoire d’une nation ; mais, pour construire un édifice durable, ne convenait-il point d’appuyer la toiture de cristal sur des murs de pierre, ou tout au moins de brique ? Plusieurs artistes regrettent pourtant qu’on se soit arrêté à ce dernier. Les maisons de verre, comme le palais de Sydenham, n’appartiennent point à un style d’architecture bien décidé : on pourrait même soutenir, à un certain point de vue, que c’est l’absence de toute architecture ; mais du moins elles répondent bien aux tendances de notre siècle, et sous la main des Anglais ces légers édifices revêtent un caractère de grandeur, de hardiesse et de fantaisie qui défie tous les autres systèmes de construction. Quoi qu’il en soit, le choix du comité s’arrêta sur les plans du capitaine Fowke. Cet architecte avait d’abord proposé le dessin d’un édifice dont le devis s’élevait à 590,000 liv. sterl., et qui fut repoussé pour des raisons d’économie. Dès qu’on fut tombé d’accord sur le projet du bâtiment tel qu’il existe aujourd’hui, les travaux commencèrent et se poursuivirent avec une activité toute britannique. Il n’y a guère plus d’une année que le terrain sur lequel s’élève le nouveau palais était encore un immense tapis de gazon ombragé de quelques arbres. L’un de ces grands arbres avait même été respecté par la hache, et l’on eut l’idée de l’envelopper tout vivant dans les proportions colossales de l’édifice. Il n’a été abattu que peu de temps avant l’ouverture, et parce que son