Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 40.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tralie, primitivement si pauvre en mammifères ? Quiconque rencontre dans les cases de la Nouvelle-Galles du sud (New South Wales) des exemplaires d’alpacas nés à Sidney, dit l’inscription, pourrait croire que de tels animaux utiles sont originaires de cette partie du monde. Qui ne sait pourtant qu’ils y ont été transportés pour les besoins de l’agriculture et du commerce ? C’est l’homme qui, après les avoir conquis sur l’état sauvage, leur a donné une seconde patrie. Le lien des faits entre l’histoire naturelle et l’histoire du travail arrête à chaque pas les regards du penseur dans cette miniature du globe qu’on appelle l’exposition universelle. Pour nous en tenir à l’Amérique, n’est-ce point la présence de l’huître à perles dans les mers du sud, — et dont on peut voir des exemplaires dans le département de Costa-Rica, — qui a créé sur les côtes une race de hardis plongeurs ? Des coquillages fins, nacrés et transparens ont servi de modèles, dans les îles Bahamas, pour ces ornemens de tête et ces corbeilles, véritables ouvrages d’art, qui occupent beaucoup de mains et font vivre beaucoup de monde. Les éclatans insectes du Brésil ont été convertis par les habitans en fleurs artificielles dont les pétales sont des ailes ou des organes. Est-ce en vain que la Guyane anglaise étale sa merveilleuse collection d’oiseaux[1], que la Jamaïque nous montre ses tortues, que l’île de la Trinité se glorifie de ses bois ? Non, le plumage éclatant de ces riches oiseaux fournit des ornemens à la toilette des femmes, ces tortues recouvrent les meubles et fournissent une précieuse matière aux ouvrages d’écaille, ces bois se transforment en tables qui, grâce à des incrustations de diverses couleurs, ressemblent à d’anciennes mosaïques. Je m’en voudrais d’oublier le ver à soie, dont les cocons pendent comme des fruits d’or à des rameaux secs, et qui a si puissamment contribué au luxe de la toilette dans les possessions du Nouveau-Monde.

N’est-ce point encore une substance minérale cachée par la nature dans le sein de la terre qui a peuplé l’Australie ? C’est autour des mines d’or comme autour d’un centre qu’a rayonné le mouvement de la colonisation[2]. Ce métal précieux nous apparaît sous toutes ses formes primitives, en lingots, associé aux roches de quartz, émietté et en quelque sorte confondu avec la terre. Les procédés d’extraction et de lavage, la manière de moudre les roches et

  1. La Guyane britannique réclame peut-être une mention particulière pour le soin avec lequel elle se trouve représentée dans ses tribus ornithologiques, ses singes, ses serpens, ses colliers de dents de caïman, ses armoires de bois de tigre, et surtout une hutte en miniature qui contient les massues de guerre, les idoles, les hamacs, et tout le rude ameublement d’une famille indienne.
  2. Un obélisque doré ou trophée australien, pour me servir de l’expression consacrée par les Anglais, reluit depuis peu de temps au soleil, fier de représenter huit cents tonnes d’or, c’est-à-dire une valeur de plus de cent millions de livres sterling, qui a été extraite du sol de la colonie depuis ces dernières années.