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qu’aucun signe ne rappelle religieusement le premier empereur chrétien. Le bas-relief qui, représente la défaite de Maxence est sans miracle, et un autre qui est resté de l’édifice primitif montre encore Trajan sacrifiant aux dieux ; l’inscription géminée célèbre le césar-auguste Constantin qui a vengé la république d’un tyran et de sa faction : instinctu divinitatis, mentis magnitudine. Quand une partie de ces mots tiendrait lieu, ainsi qu’on l’a dit de la formule païenne diis faventibus, c’est l’idolâtrie impériale qui aurait remplacé l’expression polythéiste, et donner de la divinitas à un empereur n’était pas un signe de conversion. Constantin reçoit encore ici le titre de pontifex maximus, et dans l’inscription de la grande arcade, fundatori quietis, liberatori urbis, il faut les yeux, de la foi pour voir une allusion à la paix religieuse. À Rome, le changement de culte de l’empereur n’a pas dû être gravé avec empressement au front des monumens publics. C’était beaucoup que d’obtenir une tolérance muette des autorisés locales, et l’adulation même a dû quelque temps refuser au maître converti l’adhésion et la sympathie. Peut-être Constantin s’est-il décidé, à transférer le siège de l’empire à Byzance parce qu’il désespérait de faire de Rome la capitale du christianisme.

L’arc de Constantin n’échappe pas, pour moi, à l’inconvénient commun à ces sortes de constructions, la lourdeur de l’attique, qui me paraît surtout écraser les portes latérales. La masse relativement plus grande qui surmonte l’arc de Titus ne me semble pas l’accabler autant, bien qu’il n’ait qu’une seule ouverture, et je crois le préférer aux deux autres, encore qu’il n’ait rien d’égal aux huit colonnes en saillie qui servent de contre-forts à l’arc de Constantin. Clément VIII eut une singulière idée d’en détacher une pour en décorer une chapelle de Saint-Jean de Latran.

Si du pied de l’arc de Constantin, on tourne la tête, on a devant les yeux le Colisée. Le Colisée ! « Que Memphis la barbare ne parle plus des merveilles de ses pyramides ; que le travail interminable de ses constructions n’enorgueillisse plus Babylone ;… que tout cède à l’amphithéâtre de César ! » Ainsi parlait Martial, et le césar qu’il célébrait était celui que Flaviens qui avait achevé le monument, l’empereur Domitien. C’est le triste sort de plus d’une ruine romaine que d’être comme marquée d’infamie par le nom, de quelque empereur. Celle-ci a dû cependant, son origine à une pensée populaire d’un meilleur prince. Néron, qui mettait la toute-puissance au service d’un goût hellénique et d’une imagination éprise du gigantesque, avait de l’élégante maison de Mécène fait sa célèbre maison dorée, palais immense, dont les constructions et les dépendances couvraient une partie de l’Esquilin et envahissaient plusieurs quartiers