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forcé dans les transactions commerciales ; mais ils ne sont pas admissibles pour le paiement des rentes constituées, des intérêts hypothécaires. L’état les reçoit dans toutes ses caisses, la douane exceptée ; mais il s’interdit de les imposer pour le paiement des rentes et intérêts dont il est. lui-même redevable. Ils sont immédiatement convertibles, à la volonté du porteur, en rentes personnelles sur l’état. Pour faciliter ces échanges, que le ministre pratique en raison des demandes et dans la mesure des besoins du trésor, on a mis à sa disposition un capital de 2 milliards 500 millions de francs. Les rentes de ce fonds transmises au pair portent 6 pour 100 d’intérêt, payables en espèces métalliques et affranchis de toute retenue : elles sont remboursables en vingt ans ; toutefois l’état se réserve le droit de les racheter au pair après cinq ans, et il constitue à cet effet une réserve d’amortissement en or et en argent, équivalant à 1 pour 100 du capital nominal.

Le devoir des banques, dicté par la nécessité et d’ailleurs conforme à leurs intérêts, est de faciliter autant que possible les formidables émissions qui doivent résulter de ce système. À l’imitation de ce qu’a fait sous Pitt la Banque d’Angleterre, elles tendent à échanger contre des titres de la dette publique leur propre capital, qu’elles prêtent à l’état. Elles sont convenues de recevoir les bons du trésor en dépôt, comme argent comptant, et le clearing house de New-York, imité sans doute par les autres cités commerciales, établit ses balances au comptant en mêmes bons au pair.

Une autre condition était indispensable pour que les papiers de circulation fussent préservés de l’avilissement. La promesse de payer en argent les intérêts de la dette publique offrait bien une certaine garantie contre l’excès des émissions : encore fallait-il que l’état possédât pour l’accomplissement de ses engagemens des ressources évidentes. Jusqu’alors, la grande république avait ignoré toutes ces variétés de l’impôt qui sont cultivées dans le vieux monde ; elle avait tiré presque tous ses revenus de deux sources, le droit à l’entrée des marchandises étrangères et la vente des terres publiques. Ces deux articles lui procuraient environ 300 millions de francs, somme évidemment insuffisante. On ne pouvait même plus compter sur les recettes habituelles des douanes : elles étaient comprimées par la sécession des onze états et par les exagérations du tarif Morrill. On avait mis à l’essai quelques impôts nouveaux, et notamment un impôt foncier, évalué théoriquement à 400 millions ; mais l’expérience avait déjà démontré l’extrême difficulté d’établir une taxe directe sur les terres dans ces contrées immenses où les propriétés sont