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péril et une sanglante compensation aux grandes batailles et aux scènes ardentes qu’il rêvait.

Le procès depuis longtemps instruit sur le rôle de Catherine dans le célèbre drame du 24 août 1572 trouve-t-il par ces documens sa conclusion dernière ? Nous n’oserions pas l’affirmer. D’abord on connaissait déjà une partie des témoignages sur lesquels M. Baschet s’appuie, car une au moins des relations vénitiennes qui traitent de la Saint-Barthélémy était imprimée dans la collection Alberi. De plus, les témoignages qu’invoque l’auteur ne sont pas nombreux, et ce n’est pas toujours la meilleure garantie de sûre information que d’avoir assisté aux épisodes qu’on raconte. Tout au moins faut-il reconnaître que M. Baschet a non-seulement donné un nombre très considérable d’informations entièrement nouvelles, mais encore contrôlé, en recourant aux originaux, celles qu’on avait déjà sur toutes les questions se rattachant de près ou de loin au souvenir de Catherine de Médicis. Désormais l’historien ne pourra négliger de consulter son livre.

Une bonne partie du volume est consacrée à Philippe II d’Espagne, dont il semble que les ambassadeurs vénitiens aient étudié la physionomie politique avec un soin tout particulier. L’éditeur et l’auteur ont ajouté à l’intérêt des documens qui concernent le démon du midi en les illustrant par le fac-similé d’une longue lettre d’Antonio Perez couverte de notes marginales écrites de la main de Philippe II ; c’est avec cette infatigable assiduité que le fils de Charles-Quint, du fond de son cabinet, s’efforçait encore de gouverner ses nombreux états et de régenter l’Europe, et la vue de si incontestables témoignages facilite singulièrement l’intelligence des textes, en faisant revivre les temps et les figures historiques.

Nous n’avons rien dit de Louis XII et de François Ier, sur qui M. Baschet a rapporté de nombreuses relations vénitiennes, et rien non plus de la brillante série des papes Jules II, Léon X, Clément VII, Sixte-Quint, successeurs d’Alexandre VI Borgia. Et pourtant que de traits vivement saisis dans cette série de figures animées ! par exemple cette simple note de Leonardo Donato au sortir d’une audience de Clément VIII : Simulator maximus, et ce mot de Léon X précieusement conservé par Marino Giorgi : « profitons de la papauté, puisque Dieu nous l’a donnée ! » et cette énergique expression de l’ambition indomptable de Jules II : « le pape veut être maître et seigneur du jeu du monde ! » En vérité, chaque page du livre de M. Baschet offre quelque trait semblable ; bien plus, grâce à l’authenticité des documens, à la précision des indications diverses, chacune exhale comme une senteur de cet âpre XVIe siècle, admirablement décrit par les diplomates vénitiens.


A. GEFFROY.


AMERIQUE LATINE.

Recueil complet des Traités, Conventions, Capitulations et autres actes diplomatiques de tous les états de l’Amérique latine, depuis l’année 1493 jusqu’à nos jours, précédé d’un Mémoire sur l’état actuel de l’Amérique, par M. Carlos Calvo ; 3 vol. Paris, chez Durand, 1862.


Ce ne serait peut-être pas absolument une fantaisie paradoxale à un certain point de vue de dire que notre histoire contemporaine, surtout depuis