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le règlement des salaires déjà acquis[1]. Ce sont là de précieuses innovations pour nos armateurs, car leurs navires y trouvent la possibilité de parcourir toutes les mers du globe sans solution de continuité dans leur armement et de prendre une part plus grande à l’intercourse avec la Grande-Bretagne et ses colonies, les navires étrangers étant admis dans ses ports au traitement national en vertu de l’acte de navigation de 1849.

Des facilités ont été accordées aussi pour la composition des équipages. On peut embarquer en remplacement de mousses des novices âgés de moins de dix-huit ans et sans précédent à la mer, ce qui modifie le décret du 23 mars 1852 dans cette disposition qui obligeait les novices de justifier à l’âge de seize ans de dix-huit mois de navigation pour être embarqués. Enfin les autorités maritimes sont ramenées à l’observation de l’acte de navigation de 1793, qui permet d’introduire dans les équipages un quart de matelots étrangers[2].

M. de Chasseloup-Laubat, on le voit par l’énumération de ces mesures, a voulu laisser le moins à dire, le moins à réclamer aux représentans des ports de commerce. En prenant ainsi les devans, M. le ministre de la marine aura-t-il réussi à mettre hors de cause dans l’enquête l’inscription maritime ? Lorsque cette question a été abordée par quelque côté, M. le président du conseil supérieur du commerce s’est empressé de dire qu’elle n’était pas en discussion. Cependant comment pourrait-on traiter des conditions de la marine marchande sans parler de l’institution dont elle est la base ? Est-ce que la prospérité de notre navigation commerciale n’est pas le plus sûr élément de notre marine militaire ? Comment justifierait-on l’immixtion incessante de l’administration dans les rapports des armateurs avec les gens de mer, si ce n’est par la protection que l’état doit aux marins qui dans un moment donné armeront ses vaisseaux ? De leur côté, nos armateurs ne peuvent-ils pas accuser cette protection d’être la cause pour eux de difficultés et de charges dont leurs concurrens étrangers sont affranchis ? Qu’on ne se fasse donc pas illusion : la voie de réforme dans laquelle on semble entrer conduit infailliblement à toucher plus ou moins profondément à l’inscription maritime. Jusqu’à présent, nous devons le dire, les représentans des ports, qui ont, comme M. le ministre de la marine, le pres-

  1. Circulaire du 9 juillet 1861.
  2. Le rétablissement de cette ancienne règle ne suffit pas pour nous mettre dans une situation analogue à celle de plusieurs marines rivales. En, Angleterre, en Belgique, en Danemark, en Hollande, en Norvège, en Prusse, en Suède et dans les villes anséatiques, aucune restriction n’existe pour la composition des équipages, sauf pour quelques-unes de ces nations qui exigent que le capitaine soit du pays.