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sulmans du pays. — Sauf à Belgrade, où les difficultés de la contiguïté se sont envenimées, les musulmans des forteresses intérieures de Serbie, anciens habitans du pays, vivaient en assez bonne intelligence avec les Serbes. Leur substituer des troupes régulières, c’est substituer un élément d’agitation et de lutte à un élément paisible.

Présence des troupes ottomanes, composées en grande partie de bachi-bouzouks, sur la frontière méridionale de la Serbie. — Ce n’est que depuis deux ans que les bachi-bonzouks sous prétexte d’observer la frontière serbe, la troublent et l’inquiètent. Il y a là pour les Serbes une cause de mécontentement et d’effervescence. Il faut qu’ils gardent leur frontière; il faut qu’ils repoussent à main armée les incursions des bachi-bouzouks, qui sont, on le sait, les plus indisciplinées des troupes turques. C’est une petite guerre qui peut amener la grande.

Émigration de plusieurs familles tartares dans le pachalick de Widin, tout près de la frontière serbe. — Ces familles ont été établies dans des villages bulgares, logées dans des maisons bulgares, et elles vivent aux dépens des Bulgares. Ceux-ci, effrayés et persécutés, viennent se réfugier en Serbie. De Là deux dangers : la sympathie des Serbes pour leurs frères chrétiens de Bulgarie fait qu’ils prennent parti pour les Bulgares chassés de leur patrie, et le ministre des affaires étrangères de Serbie déclare « qu’aucun gouvernement serbe n’oserait répudier et combattre une sympathie si naturelle et si vive. » L’autre danger que le ministre serbe signale sans le craindre, dit-il, pour la Serbie, c’est que cette colonisation tartare ne soit le noyau d’un cordon militaire musulman formé par la Porte entre les Bulgares et les Sorbes, c’est-à-dire entre deux populations chrétiennes. Cette colonisation musulmane n’a aussi que deux ans de date, et elle fait visiblement partie du système de résurrection agitée, mais impuissante, que l’Angleterre inspire à la Porte-Ottomane.


III.

Nous ne savons pas encore très exactement ce que la conférence tenue à Constantinople, entre les ministres des puissances signataires du traité de 1856, a décidé sur les contestations pendantes entre la Porte-Ottomane et la Serbie. Il n’y avait, à vrai dire, qu’une seule question à décider, celle des forteresses. Fallait-il les laisser entre les mains des Turcs, surtout celle de Belgrade? Toute la difficulté est là. Avec la contiguïté imposée à Belgrade aux Turcs et aux Serbes, tous deux armés et tous deux s’observant et se haïssant, la