Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 41.djvu/991

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la France dans les principes de sa révolution et que la constance de l’Italie dans son aspiration nationale ne fussent mises à cette dernière épreuve, afin que la nécessité de la seule solution logique de la question italienne fût prouvée par l’impuissance des adversaires de cette solution, et reçût la sanction finale de la démonstration par l’absurde.

Quoi qu’il en soit, si notre voix parvient aux hommes politiques de la péninsule, nous voudrions leur faire entendre que le moment est grave pour l’Italie. Il serait également périlleux pour eux de s’endormir dans un complaisant optimisme, de s’abandonner à des impatiences étourdies, de s’affail)lir par des divisions intestines. Il importe avant tout qu’ils s’unissent dans l’affirmation du vœu national et dans le maintien de l’ordre public. C’est en des circonstances telles que celles-ci que les Italiens, serrés autour de Victor-Emmanuel, devraient nous donner encore un de ces exemples d’union et de discipline par lesquels ils ont si souvent surpris et charmé l’Europe libérale du temps de M. de Cavour. Nous faisons ici appel au patriotisme et au libéralisme des ministres italiens autant qu’aux sentimens les plus élevés des dissidens et des adversaires du cabinet actuel. Des hommes tels que MM. Rattazzi, Ricasoli, Farini, Peruzzi, Minghetti, sans oublier les notabilités les plus honorées de l’armée, devraient en ce moment regarder bien plus à ce qui les rapproche qu’à ce qui les divise, et, s’il fallait sauver les compétitions d’amour-propre, s’allier dans un ministère sous la présidence d’une illustration militaire. Si en effet, ce qui paraît fort à craindre, le gouvernement du roi Victor-Emmanuel n’est pas autorisé à annoncer au parlement italien que la France assigne un terme à l’occupation de Rome, il est nécessaire, pour que la cause italienne ne se déchire pas dans la péninsule et ne décline point dans le monde, que le ministère soit constitué de telle sorte qu’il puisse contenir et en même temps soutenir l’Italie par son autorité morale, et mériter l’estime et la sympathie de l’Europe libérale. Il faut maintenant à l’Italie un gouvernement franc et ferme, qui montre au pays la difficulté telle qu’elle est, qui n’encourage aucune illusion, et qui, sans aigreur envers la France, où les sympathies du libéralisme ne lui feront pas défaut, apprenne à l’Italie à ne compter pour le succès définitif que sur la sagesse de sa conduite et la bonté de son droit. C’est maintenant au tour de la Prusse de faire parler d’elle, et c’est la faute de son gouvernement, si l’on ne parle point d’elle à son avantage. Le conflit constitutionnel si étrangement élevé par le ministère prussien, soutenu par la chambre rétrograde des seigneurs, à l’encontre de l’assemblée populaire, est un triste anachronisme, qui déroute les espérances que l’on s’était plu à concevoir dans l’avenir libéral de la Prusse. On avait cru généralement en Europe que la Prusse possédait les élémens d’un gouvernement représentatif ; le roi de Prusse et M. de Bismark veulent nous ôter cette illusion. Le principe essentiel du gouvernement représentatif est le vote des lois de finances par la chambre qui représente le peuple. Une chambre populaire à laquelle ce droit est contesté par la royauté ou par la chambre