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pas plus de plaisir à se revoir dans les caricatures à la plume de ce spirituel adversaire que dans les lignes maladroites et les tons faux des portraits officiels. Hélas ! une législation n’était point nécessaire pour imposer silence à Marrast : la mort s’était chargée de ce soin, la mort qui l’a frappé, après le triomphe éphémère et la défaite de sa cause, dans une pauvreté où s’est révélée l’intégrité de son caractère, et qui sera le solide honneur de son nom.

Au surplus, quelques-unes des questions qui ont été traitées îi propos de l’adresse reviendront peut-être sous une forme plus pratique dans la discussion du budget. Parmi ces questions, nous plaçons au premier chef celle du Mexique, qui affecte si péniblement nos finances. On peut se faire une idée de la fâcheuse influence de l’affaire du Mexique à cet égard en lisant l’intéressante brochure que M. Casimir Perler vient de publier sur la .situation financière en 1863. A proprement parler, les critiques que M. Casimir Perier adresse au ministre des finances à propos des incidens de l’exercice 1862 retombent en plein sur l’expédition du Mexique. Ce sont les frais de cette guerre qui ont empêché que le budget de 1862 se soldât en équilibre ; ce sont les développemens de l’expédition qui ont entraîné la nécessité du crédit supplémentaire qui est demandé à la chambre et des traites fournies du Mexique sur notre trésor, et dont l’émission a anticipé ce crédit. Les observations piquantes présentées par M. Perier à propos de ces traites montrent qu’il existe une lacune dans notre organisation financière. Les documens officiels laissent en effet un point important dans l’obscurité. Aucun crédit n’étant légalement ouvert, le trésor a été cependant engagé par l’émission des traites fournies pour les besoins de la marine et de la guerre. Comment une telle opération a-t-elle pu s’accomplir ? Le ministre des finances a-t-il autorisé préalablement la répartition entre la marine et la guerre d’un crédit qui n’existait pas ? Les ministres de ces départemens ont-ils pris sous leur responsabilité le parti d’engager le trésor suivant les besoins révélés de l’expédition ? Nous l’ignorons. En Angleterre, croyons-nous, la division de la responsabilité est parfaitement établie dans la prévision de circonstances et de nécessités analogues. Le département ministériel où se manifestent des besoins imprévus s’adresse par correspondance au premier lord de la trésorerie, chef du gouvernement, lequel, s’il fait droit à la demande, transmet l’ordre par lettre au chancelier de l’échiquier, qui est le véritable ministre des finances, de fournir les ressources réclamées, et régularise ultérieurement la situation en réclamant du parlement un bill d’indemnité, et en publiant dans le livre bleu la correspondance échangée. En France, le premier lord de la trésorerie est l’empereur. Il nous semble que, pour le bon ordre, les choses devraient se passer comme en Angleterre lorsqu’il se présente un cas semblable à celui qui motive aujourd’hui un crédit supplémentaire. Les ministres qui ont un besoin de fonds imprévus devraient adresser à l’empereur la justification écrite de