Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 43.djvu/114

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

production agricole. Les applications les plus récentes de la chimie et de la mécanique à l’agriculture, tels sont les deux points à traiter, et qui marquent la division naturelle de cette étude. Sans doute beaucoup de ces applications semblent au premier abord ne se rattacher que de très loin à la vie et au travail des champs. Qu’on y regarde de près toutefois, et l’on reconnaîtra que les mêmes progrès qui assurent l’activité de nos manufactures concourent aussi pour une large part à la prospérité de nos exploitations rurales.


I

Un des premiers services rendus par la chimie à l’agriculture, c’est qu’elle en soumet les travaux à des principes sûrs, en lui révélant les conditions les plus favorables à la nutrition des végétaux. De là des inventions très variées, où la France a généralement la part de l’initiative, où l’Angleterre a le plus souvent celle des perfectionnemens, facilités par l’abondance des capitaux, du combustible et des grands moyens de communication.

Parmi les agens de la production agricole se présentent en première ligne les engrais. Nous avons indiqué déjà les bases sur lesquelles repose la théorie qui classe parmi les matières fertilisantes douées de la plus grande valeur vénale les substances organiques azotées fermentescibles et les phosphates minéraux. De grands avantages devaient résulter d’une association opérée entre ces divers élémens de la nutrition végétale. Dans la Grande-Bretagne, on avait préparé pendant longtemps et l’on expédiait presque toujours séparément ces deux sortes d’engrais commerciaux. Aujourd’hui l’on a modifié heureusement cette méthode. D’une part, on réduit en poudre fine les coprolithes (phosphates minéraux des anciens âges), et d’un autre côté l’on écrase plus grossièrement entre des cylindres dentés en fonte les débris osseux de la viande. Ces deux sortes de matières broyées sont réunies, intimement mélangées avec moitié de leur poids d’acide sulfurique à 50 degrés, puis jetées aussitôt dans une vaste fosse en maçonnerie que l’on remplit peu à peu. Or le phosphate des deux origines et le carbonate de chaux, attaqués par l’acide avec dégagement de chaleur, forment un biphosphate et un sulfate de chaux qui se solidifient par le refroidissement, et l’on obtient ainsi une masse cristallisée assez consistante pour qu’il soit facile de l’enlever à la pelle et de la charger soit en wrac ou sans emballage, soit dans des sacs, sur des barques ou des tombereaux.

À l’économie que ces innovations procurent dans les manipulations, les chargemens et les transports, se joint pour le cultivateur l’avantage d’une dissolution plus prompte dans les champs et d’une