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conditions, la dépense de force mécanique et les frais de réparation laissaient douteuse la question d’économie.

Deux innovations remarquables, réunies surtout dans le système d’un mécanicien anglais, M. Fowler, ont très avantageusement modifié les conditions. du travail : en substituant au fil de fer le fil d’acier pour former le câble, on a diminué de beaucoup, le poids et obtenu une force et une résistance plus grandes au frottement ; on se sert, pour imprimer le mouvement, d’une locomobile qui se déplace en même temps que les bâtis, maintenus par des ancres circulaires et pointant les poulies de renvoi. Il n’est plus besoin d’entourer le champ ; la longueur du câble est diminuée de moitié, des trois cinquièmes ou davantage, suivant la configuration de la pièce de terre : nouvelle cause de diminution des frais de réparation et de la dépense de force mécanique. On comprendra sans peine que de telles améliorations aient pu assurer le succès du labourage à vapeur, En effet, de l’avis des ingénieurs et des agronomes compétens que j’ai consultés à Londres, notamment M. Denison, président de la chambre des communes, M. Mechi, un agriculteur très distingué, et M. Nanti, membre et secrétaire honoraire de l’association des ingénieurs civils, le problème est favorablement résolu pour le plus grand nombre des localités en Angleterre. Des entrepreneurs se chargent maintenant de labourer pour les cultivateurs à des prix plus bas qu’il n’en coûtait naguère, par exemple à 24 ou 25 francs l’hectare.

En France, les conditions seront généralement un peu différentes : les prix de la houille, du fer et de l’acier sont plus élevés, et les terres moins bien ameublies ; toutefois il restera sans doute un bénéfice suffisant encore pour décider nos fermiers à suivre cette méthode. La question au surplus ne peut manquer d’être résolue bientôt, car M. Bella, le savant directeur de la grande ferme-école de Grignon, vient d’installer le labourage à vapeur sur ce domaine, et les premiers résultats lui ont paru avantageux. M. Cail, propriétaire à La Briche, près de Tours, d’une ferme de 1,400 hectares, a pris, pour installer prochainement ce système, des dispositions très convenables, que j’ai examinées avec MM. Amédée Durand et Magne, membres de la Société d’agriculture de France. Il n’est pas hors de propos d’indiquer ici l’une de ces dispositions spéciales, car ce sera répandre à une objection faite avec raison en d’autres circonstances contre l’emploi du labourage mécanique. M. Cail a creusé dans toute l’étendue du terrain de sa ferme de larges fossés, profonds de 2 à 3 mètres suivant les pentes naturelles, destinés à recevoir et à laisser écouler les eaux amenées de tout un ensemble de drainage par des conduites principales. Ces eaux courantes, qui ont fait donner le nom de rivières à ces larges fossés, ne s’élèvent pas bien haut dans l’état ordinaire ; mais en disposant avec