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beaucoup à faire pour perfectionner nos institutions, répandre les idées vraies et accoutumer le pays à compter sur lui-même… » C’est parler d’or, et il nous est impossible d’exprimer avec une suffisante énergie toute la conviction que rencontre en nous cette déclaration impériale. Nous trouvons là le résumé puissant des principes qui nous inspirent dans la politique intérieure : qu’il nous soit également permis d’y voir un encouragement à nos modestes et persévérans efforts. Oui, il y a beaucoup à faire pour porter nos institutions au degré de perfection désirable ; oui, il y a beaucoup à faire pour répandre en France les idées vraies ; oui, il y a beaucoup à faire surtout pour accoutumer le pays a compter sur lui-même. Nous voudrions que ce programme fût médité avec l’attention qu’il mérite, fût discuté avec la liberté qu’il implique, fût rempli avec la sincérité et l’application qu’il commande, et nous n’en demanderions point d’autre pour la cause libérale dans les prochaines élections. C’est justement pour que les idées vraies se puissent répandre et pour que le pays s’accoutume à compter sûr lui-même qu’il faut que nos institutions soient perfectionnées par d’efficaces et salutaires réformes. Quand on voit si clairement le but, serait-il en effet possible que l’on méconnût la réalité des obstacles ? Les obstacles qui empêchent la diffusion des idées et nous ajouterons des sentimens généreux, les obstacles qui empêchent le pays de s’accoutumer à compter sur lui-même, ne sont-ils point dans la législation restrictive qui entrave la réalisation de la formule vivante du libéralisme, le gouvernement du pays par le pays ? Il importe que les idées vraies et les bons sentimens se répandent ; mais comment cela est-il possible, si les lois découragent l’initiative individuelle et l’esprit de libre association, si elles intimident la presse, c’est-à-dire le mécanisme même par lequel s’opère, surtout dans l’état de notre civilisation, la communication entre les intelligences et les âmes ? Si vous voulez que le pays marche en comptant sur lui-même, la première chose à faire n’est-elle pas de dénouer les lisières qui lui ôtent la spontanéité et la responsabilité de sa conduite ?

La liberté de la presse se prescrit ou se recommande au nom de plusieurs ordres de droits et d’intérêts. La revendication la plus haute de cette liberté se fonde sur le droit, droit que les principes de 1789 ont vainement consacré jusqu’à ce jour ; dans l’ordre des argumens philosophiques, la liberté de la presse se présente comme le résumé et la sauvegarde de toutes les libertés, et l’on peut affirmer avec Royer-Collard que là où elle vient à manquer, les autres libertés demeurent sans garantie. Mais nous avons vécu en des temps où le droit a perdu sa force de persuasion sur les âmes fatiguées et grossières. La liberté de la presse peut encore être invoquée au nom des intérêts intellectuels de la France : certes la gloire intellectuelle est une des gloires auxquelles notre pays ne peut être insensible, et il n’est pas de nation où l’émulation que nourrit la liberté de penser et d’écrire puisse, plus que chez la nôtre, profiter à l’activité des esprits, à la culture des intelligences, à l’éducation des âmes. La presse ne peut parmi