Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 43.djvu/797

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sources d’une nation prodigieusement riche pour faire face de six mois en six mois au règlement des intérêts. Ce dernier service a été dévolu à la Banque, car chez nos voisins la main de l’état ne se montre guère, même quand elle paie.


III.

L’origine de la dette nationale remonte à Charles II. Ce roi avait contracté un emprunt dont le principal, comme disent les Anglais, n’avait jamais été remboursé. Cet emprunt fut plus tard enveloppé par Guillaume III dans les charges du royaume. Il serait superflu de suivre à diverses époques les incroyables progrès de la dette publique en Angleterre. Tout le monde sait qu’elle fut plus que doublée, il y a un demi-siècle, par les gigantesques efforts de l’Angleterre pour s’opposer aux envahissemens du premier empire. Quelques économistes, frappés sans doute de l’énorme charge que d’anciennes victoires, et surtout la dernière lutte, font peser sur les générations suivantes, ont reproché avec quelque mauvaise humeur à la Grande-Bretagne d’avoir jeté son argent à la mer. C’est en effet pour maintenir et accroître sa puissance sur les flots que la nation anglaise s’est principalement imposé de tels sacrifices ; mais comme la mer était son boulevard, comme elle doit après tout à ces pertes matérielles d’avoir sauvé ses libertés et son territoire, il y a dans le monde d’autre argent beaucoup plus mal dépensé que celui-là. Quoi qu’il en soit, les actes d’emprunt (loan acts) lancés à plusieurs reprises par les deux chambres stipulaient dès l’origine qu’aussi longtemps que la Banque d’Angleterre continuerait d’exister comme corporation, des livres seraient ouverts dans ses bureaux pour recevoir les noms des créanciers de l’état. Au début d’un de ces emprunts, les souscripteurs reçoivent du caissier, en retour de leur argent, un certificat portant leur nom, leur résidence et leur qualité. Ce certificat, qui reste entre les mains de la Banque, est ensuite transcrit sur un journal, puis sur un grand-livre, et c’est alors qu’il devient ce que les Anglais appellent stock (fonds ou effet public). Le caractère des stocks est d’être transférable à volonté. Quiconque a une fois son nom inscrit sur les livres de la Banque peut vendre en tout ou en partie la propriété de son titre, ou, pour mieux dire, de son inscription.

Où a lieu maintenant ce commerce des fonds publics ? Dans Bartholomew-Lane, vis-à-vis de la porte orientale de la Banque. C’est là que s’élève Capel-Court, autrefois la résidence de sir William Capel, qui fut lord-maire de Londres en 1504. Une sorte de portique conduit par une allée à ciel ouvert vers un bâtiment de médiocre apparence dont l’entrée se trouve sévèrement gardée par un