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Barillon d’Amoncourt n’ayant pas été rigoureusement suivies, un nouveau règlement fut présenté eh 1716 par le grand-maître de La Faluère, qui constata en même temps la nécessité de repeupler les vides et de remplacer les futaies dépérissantes. Ce n’était pas une petite affaire, puisque s’agissait de plus de la moitié de la Contenance totale ; on se mit cependant à l’œuvre, et l’on fit des plantations de chêne sur une très grande étendue ; plus tard, on introduisit le pin sylvestre et le pin maritime, qui prospèrent mieux que le chêne sur les sols secs, et l’on finit peu à peu par repeupler la forêt tout entière, moins les roches absolument improductives. Une des plus grandes difficultés qu’on eût à vaincre, c’est l’action, particulièrement désastreuse ici, des gelées printanières, qui s’exerce sur les jeunes bois dans une zone comprise entre 1 mètre et 2 mètres 50 cent, au-dessus du sol. Ces gelées, très fréquentés, font noircir et tomber les jeunes pousses ; mais, dès qu’ils ont pu élever leur cime au-dessus de la zone fatale, les arbres sont à l’abri de toute nouvelle atteinte.

Les essences qu’on rencontre aujourd’hui sont le chêne, le hêtre, le charme, le bouleau, le pin sylvestre, le pin maritime et un grand nombre d’essences secondaires, telles que l’érable, le tilleul, l’alizier, le merisier, etc. Parmi les arbustes et arbrisseaux, il faut mentionner le genévrier, dont le bois odorant sert à fabriquer une foule de menus objets de bimbeloterie, la bourdaine, qu’ on emploie à faire de la poudre à canon, les genêts aux fleurs jaunes, et surtout les bruyères, qui affectionnent les terrains sablonneux, poussent dans les interstices des rochers, et couvrent parfois des étendues considérables. Toutes ces essences sont mélangées dans des proportions variables ; en général elles végètent bien quand le sol reste toujours couvert, mais elles s’étiolent de bonne heure quand il est plus ou moins exposé aux rayons du soleil. Lorsqu’ils sont mélangés avec des hêtres en proportion suffisante, les chênes peuvent arriver jusqu’à l’âge de cinq ou six cents ans encore en pleine vigueur et atteindre des dimensions telles que, pour mon compte, je n’en ai pas vu de plus beaux ; quand ils se trouvent à l’état pur au contraire, ils se mettent à dépérir et meurent en cime dès l’âge de quarante ou cinquante ans, comme des hommes vieux avant l’heure, fatigués du monde, qui n’aspirent qu’à le quitter. Il en a été ainsi de la plupart des plantations de chênes dont je viens de parler, et qui ne purent jamais être conduites jusqu’à l’état de futaie. On les coupa dès qu’on vit la végétation languir dans l’espoir que cette opération leur rendrait la vigueur perdue, et que les rejets obtenus réussiraient mieux que les arbres primitifs. Il en fut ainsi pendant les premières années ; mais bientôt, le dépérissement atteignant ces