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à la destruction des lapins dans un canton, on suit une autre marche ; on ferme les terriers pendant la nuit, alors qu’ils sont dehors, et on fait des battues enceinte par enceinte.


IV

Quel est, dans la condition particulière où elle se trouve, le traitement applicable à la forêt de Fontainebleau ? Comment concilier les exigences cynégétiques auxquelles elle répond avec les considérations économiques et culturales qui règlent l’exploitation des forêts ? Sous ce rapport, le doute n’est pas possible. Le régime de la futaie, avec une révolution de cent vingt ou cent cinquante ans, peut seul lui convenir. J’ai déjà eu plusieurs fois l’occasion d’exposer les raisons qui font à un propriétaire impérissable comme l’état une obligation d’adopter de longues révolutions, comme étant celles qui donnent les produits à la fois les plus considérables et les plus précieux. Toutes choses égales, d’ailleurs, une forêt exploitée une seule fois à l’âge de cent vingt ans fournit plus de matière et une matière plus utile que si, pendant le même laps de temps, on l’avait exploitée quatre fois à l’âge de trente ans. Il en résulte qu’un propriétaire qui peut attendre a tout intérêt à préférer la première exploitation. C’est le cas de la forêt de Fontainebleau, qui, appartenant à l’état, a été cédée en usufruit à la couronne, qui n’est guère moins immuable que lui. À cette première considération s’en joint une autre, qui fait de l’adoption du régime de la futaie une question d’être ou de ne pas être pour cette forêt ; c’est la nature du sol. Un terrain aussi peu consistant, qui contient 98 pour 100 de sable pur et laisse l’eau s’infiltrer jusque dans les couches inférieures ou s’évaporer aux premiers rayons du soleil, demande, pour ne pas se stériliser complètement, à être constamment couvert. L’eau est l’agent indispensable de toute végétation, et dans un sol naturellement sec le traitement appliqué doit avoir pour effet d’y conserver une certaine fraîcheur. La futaie seule remplit ces conditions, puisque les arbres, constamment maintenus en massif, protègent le sol contre l’irradiation solaire, et lui restituent, par la décomposition annuelle de leurs feuilles, les élémens minéralogiques qu’ils y ont puisés. Avec le taillis au contraire, le sol, découvert tous les vingt-cinq ou trente ans, se dessèche peu à peu, perd ses élémens fertilisans, et finit par devenir impropre à toute végétation. Nulle part les résultats produits par ces différens modes de traitement ne sont plus frappans que dans la forêt de Fontainebleau. À côté de massifs magnifiques, peuplés d’arbres plusieurs fois séculaires, d’une végétation luxuriante, on rencontre souvent des parties