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ESSAIS ET NOTICES


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Histoire de France, par M. Auguste Trognon[1].


L’auteur de ce livre rappelle, au début de sa préface, qu’il a publié, il y a environ quarante ans, des travaux d’histoire. On ne l’a pas tant oublié qu’il le suppose ; on se souvient que M. Auguste Trognon faisait partie de cette élite de jeunes gens qui s’élançaient alors avec tant d’ardeur dans toutes les routes ouvertes à l’activité de l’esprit. Jamais génération n’entreprit de plus grandes choses et n’eut tant d’espérance de les voir s’accomplir. Sans parler de la liberté politique, qu’on pensait bien avoir conquise pour toujours, on voulait d’un coup créer une philosophie nouvelle, rajeunir, la poésie, renouveler l’histoire. De toutes ces entreprises si hardiment tentées, plusieurs ont, hélas ! tout à fait échoué, d’autres n’ont qu’à moitié, réussi ; mais il en est une au moins dont le succès a été complet. Nous avons changé la façon de comprendre et d’écrire l’histoire. Retrempée à l’étude des sources, l’histoire y a puisé une intelligence plus vraie du passé, elle y est devenue plus originale et plus vivante, et l’on peut affirmer que cette grande réforme sera, aux yeux de la postérité, le plus beau titre de gloire de notre littérature.

M. Trognon, dans ce travail, avait été l’un des ouvriers de la première heure. Détourné par des fonctions délicates, et qui réclamaient tout son temps, il revient, après plus de trente ans, à ces études de sa jeunesse, et donne au public les deux premiers volumes d’une histoire de France. Ce n’est point une œuvre d’érudition, elle n’a pas la prétention d’être savante, elle n’affecte pas des airs de nouveauté. M. Trognon avoue franchement qu’il a profité des travaux des autres, quand il les a trouvés bons. Il a lu MM. Guizot, Michelet ; il a pris son bien chez eux sans scrupule. Le seul mérite qu’il s’attribue, c’est d’avoir résumé tous leurs travaux, et de les présenter réunis dans un cadre restreint. Ce n’était pas une petite affaire. Depuis que l’histoire est en faveur, l’activité des érudits s’est portée vers elle ; chaque époque a été étudiée avec soin, et il n’est pas un fait de quelque importance qui n’ait été l’objet de savantes recherches. Aussi peut-on dire que, pour ceux qu’attire principalement l’histoire générale, la route est encombrée de matériaux de tout genre. L’esprit risque de se perdre au milieu de cette abondance, et réclame quelques travaux d’ensemble qui l’aident à s’y reconnaître. C’est une œuvre de cet ordre que M. Trognon a voulu écrire. Il a borné ses prétentions à être utile, et il n’est pas douteux qu’il n’y ait réussi.

  1. 2 vol. in-8o ; Paris, Hachette.