humaine dans les mystères de l’éternité. Et pourtant comme la foi, une foi naïve et sans réserve, répand un rayon de grandeur surnaturelle sur la physionomie de ces chrétiens si bien endormis et si à l’aise dans le tombeau ! Dans cette collection des spécimens du moyen âge, on n’a même point négligé certains détails qui pouvaient donner une idée des usages de l’Angleterre durant les temps catholiques. C’est ainsi qu’on s’arrête volontiers devant la statue de « l’évêque enfant » tirée de la cathédrale de Salisbury. La coutume voulait alors qu’un évêque fût élu tous les ans parmi les enfans de chœur. Il jouissait durant l’année de tous les privilèges d’un véritable prince de l’église, et venait-il à mourir dans l’exercice de sa charge, on lui érigeait un monument : de là cette statue couchée qui réveille une idée touchante. Il n’est guère d’Anglais, si bon protestant qu’il soit, qui n’aime à retourner quelquefois en imagination vers les âges d’idolâtrie papiste. Si ces légendes de pierre heurtent le bon sens du réformé, elles flattent du moins chez lui le sentiment de la poésie. À l’origine, l’église anglicane a bien pu haïr et mépriser les images ; mais depuis qu’elle s’est greffée solidement sur le tronc émondé par la hache des premiers iconoclastes, elle tient à sauver et à conserver ce qui reste des vestiges de l’art gothique. J’ai vu à la cathédrale de Bristol de vénérables chanoines me montrer en souriant d’anciens monumens de la superstition qu’ils étaient en train de réparer avec une sorte d’amour. On ne détruit que ce qu’on craint, et la réforme religieuse en Angleterre n’a plus rien à craindre du passé.
Les savans ont donné le nom d’éocène au commencement de la dernière période géologique, c’est-à-dire à l’aurore de la création moderne. Elle éclate aussi, cette aurore, sous d’autres traits, mais avec une non moins vive lumière, quand on passe de la longue compression du moyen âge aux splendeurs de la renaissance. Quel épanouissement de la forme, quelle joyeuse revendication de la nature, si absolument humiliée et anéantie par le dogme ! Cette fête de la résurrection de l’art et de l’antiquité se trouve célébrée au Crystal Palace dans trois salles : Renaissance court, Elizabethan court et Italian court. La méthode diffère peu de celle qui a été suivie jusqu’ici : on a voulu encadrer dans un système ingénieux de décoration les principaux chefs-d’œuvre de Jean Goujon, de Lorenzo Ghiberti, de Germain Pilon, de Michel-Ange, et d’autres artistes bien connus. Le choix des monumens est heureux, et le visiteur