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partie supérieure du cyclone est rabattue sur la surface de l’eau par de violens contre-courans atmosphériques venus des pôles. En treize années, les savans hollandais n’ont observé que deux cas de cette nature.

On le voit, MM. Audrau et van Asperen ont établi, par le simple examen des faits, une des lois les plus importantes qui président aux mouvemens des masses aériennes. Nul doute que dans un avenir plus ou m(tins éloigné la comparaison journalière; de toutes les ondulations atmosphériques ne permette aux météorologistes de prédire l’état de la température dans les diverses parties du monde et de calculer d’avance les courbes des vents, de même que les astronomes calculent maintenant les orbites des planètes. Les observations recueillies sur tous les points du globe contribueront à la détermination des lois définitives; mais déjà l’on peut affirmer que le problème de la météorologie des continens sera résolu principalement sur l’Océan. Au-dessus de cet immense espace qui occupe près des trois quarts de la rondeur de la planète, les vents offrent une plus grande régularité d’allures que sur le relief tourmenté des terres; ils ne sont arrêtés ni par les endentations des côtes, ni par des chaînes de montagnes; ils ne sont détournés de leur route ni par des champs de neige, ni par des plaines de sable brûlant : ils propagent leurs ondes suivant des lois régulières parallèlement à des courans maritimes mesurés d’avance, et déjà le savant qui les étudie peut leur dire : « C’est ici que tu souffleras! »


ELISEE RECLUS.



Histoire générale de la Philosophie, par M. Victor Cousin.


Il n’y a pas longtemps que l’histoire de la philosophie est en honneur dans notre pays. On sait en quel dégoût notre Descartes avait pris le passé de l’esprit humain et comment ce réformateur de la pensée, abandonnant les docteurs et les livres, avait résolu de ne puiser la science qu’en lui-même ou dans le grand livre du monde. Malebranche poussa plus loin encore le mépris de l’histoire. Aux partisans de la critique et des études historiques, il opposait, sans hésiter, l’exemple d’Adam, et, persuadé que notre premier père avait possédé la science parfaite, il n’en voulait pas savoir plus long qu’Adam n’en avait su, et permettait volontiers de livrer aux flammes tous les poètes et tous les philosophes païens, croyant assez faire d’épargner la métaphysique, la science de la nature et les mathématiques. Leibnitz apprécia tout autrement la valeur et l’importance des doctrines anciennes; mais Leibnitz érudit et éclectique procédait de Jacques et de Christian Thomasius, comme Leibnitz métaphysicien procédait de Descartes. Pour trouver en France un premier essai d’histoire de la philosophie, il faut s’éloigner de cent ans du jour où parut le Discours de la méthode. L’ Histoire critique de la Philosophie de Deslandes en trois volumes in-12 (1re édition) porte en effet la date de 1737. Entrepris dans un certain esprit d’équité, l’ouvrage de Deslandes est cependant plein de complaisances pour