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ses pas. Tous les compromis, toutes les concessions que ce parti avait obtenues autrefois du nord en faveur du sud, avaient été réclamés au nom de l’union, et voilà que le sud portait à cette union les premiers coups et s’en déclarait l’irréconciliable ennemi. On vit alors, comme je l’ai dit, ce parti se diviser en deux fractions : la première, qui est la plus nombreuse et la plus influente, reconnut la nécessité de la guerre, et son opposition s’enferma dans les limites de quelques questions soulevées par la guerre civile, telles que la suppression de l’habeas corpus et la conscription. La minorité s’usa en vains efforts pour établir un accord permanent entre les meneurs du sud et les démocrates du nord; elle ne réussit ni à ébranler le patriotisme de la nation, ni à intimider le gouvernement; elle n’obtint pas même les honneurs de la persécution et put conspirer en quelque sorte publiquement, même après les sanglans désordres de New-York, qu’elle avait provoqués, mais qui soulevèrent contre elle l’indignation du pays entier.

Si au lieu de jeter les yeux sur le passé nous les tournions un moment vers l’avenir, que de problèmes ne verrions-nous pas surgir! Il n’est pas douteux que le triomphe même de l’Union soulèverait les plus difficiles questions. Même aujourd’hui, quelques-unes des plus délicates s’imposent déjà à l’attention des hommes d’état et des partis. A quel titre les provinces reconquises doivent-elles rentrer dans le concert fédéral ? Les démocrates veulent que tous les états aujourd’hui rebelles puissent rentrer dans tous leurs anciens droits et privilèges, qu’ils puissent garder sans changement leurs constitutions particulières, qu’ils envoient comme jadis leurs représentans au sénat et à la chambre des représentans de Washington; ils veulent que la proclamation émancipatrice de M. Lincoln demeure une lettre morte, et que la réconciliation du nord et du sud ressoude plus fortement les chaînes que la guerre a brisées. Ils disent au gouvernement : Si vous ne reconnaissez plus les Carolines, la Géorgie, la Virginie, comme des états, vous n’ayez plus devant vous que le gouvernement confédéré, vous ne pouvez plus traiter avec les états séparés et les ramener un à un dans l’Union, Les républicains répondent qu’aucun des états confédérés n’a encore manifesté l’intention d’obtenir une paix séparée : suivant eux d’ailleurs, il n’y a plus d’états là où cesse de flotter le pavillon étoile, il n’y reste que des territoires appartenant aux États-Unis et que les États-Unis cherchent à reconquérir. Ces provinces, comme toutes celles que les États-Unis ont pu obtenir autrefois par les armes ou par les traités, retombent sous la juridiction exclusive du congrès. Si elles demandent à rentrer dans le concert fédéral, il faut qu’elles se résignent aux conditions imposées aux territoires ordinaires, c’est-à-dire