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rue Louis (Ludwigs-Strasse). A chacune de ses extrémités et dans le même axe correspondent deux édifices : l’un est une imitation de la Loggia de Lanzi, dont se souviennent tous ceux qui ont vu Florence; l’autre est un arc de triomphe modelé sur celui que Constantin a dérobé à Trajan.

Est-ce une heureuse idée que d’avoir importé là cette loggia florentine? Malgré l’origine militaire qu’on lui attribue, puisqu’on veut qu’elle ait servi de corps de garde aux lansquenets de Come Ier, la galerie d’Orcagna doit beaucoup à sa position. C’est un édifice élégant au pied du Palais-Vieux; il fait contraste avec cette noire et massive citadelle, qui semble le menacer. Il est garni de statues qui seraient l’honneur d’un musée, et cette galerie d’objets d’art ouverte en plein air au public de la place du Marché aux Herbes, réveille à Florence un souvenir d’Athènes. Le fac-similé de Munich, sous le nom de Halle des maréchaux, est redevenu bon pour des lansquenets, et deux raides statues du comte de Tilly et du prince de Wrede ressemblent à des factionnaires. L’arc de triomphe produit plus d’effet; mais j’ai peine à croire qu’on lui ait donné les proportions de celui de Constantin. Les colonnes en contre-forts ne semblent pas avoir la même importance. Le char de bronze qui le surmonte, attelé de quatre lions que conduit la Bavière vêtue en Pallas teutonique, a l’air un peu écrasé; mais l’ensemble n’est pas sans majesté, et peut rivaliser avec l’arc de la paix à la porte orientale de Milan.

Chemin faisant, outre plus d’un palais que nous ne pouvons mentionner, on trouve plusieurs statues dont la plus intéressante est celle de Schiller. Elle est en cuivre avec la couleur luisante d’un jaune rosacé, que ce métal affecte quand il est neuf et poli. L’effet en est singulier, mais peu agréable, et la statue semble inférieure à celle de bronze qu’on voit à Stuttgart , ouvrage expressif de Thorwaldsen, moins toutefois que le buste de marbre du musée de la même ville, sculpté du vivant du modèle par Dannecker (1794). Un peu plus loin, on trouve encore une pseudo-antiquité qui satisfait peu : c’est un obélisque en bronze. Le mérite d’un obélisque consiste dans son origine, les hiéroglyphes dont il est couvert, la matière dont il est formé : surtout ce doit être un monolithe qu’on s’étonne de voir debout; mais que signifie une pile tout unie de tambours quadrangulaires entassés et ajustés ensemble? La colonne de la grande armée, qui porte un bas-relief enroulé, celle de juillet, qui contient une longue série d’inscriptions, toutes deux avec un chapiteau orné et une statue au faîte, sont des œuvres de sculpture autant que d’architecture; l’obélisque de Munich est une pièce d’ajustage qui n’appartient à aucun art.