les mener de front ; si l’on ne s’y résout point, quel parti prendra-t-on ?
A l’intérieur, nous l’avons dit, la vérification des pouvoirs des députés posera sous la forme la plus pratique les questions constitutionnelles les plus hautes. La vérification des pouvoirs intéressera la discussion et édifiera l’opinion de deux manières : par les faits qu’elle mettra en lumière et par les conclusions générales qu’elle permettra de tirer de l’ensemble du procès. Les faits seront assurément curieux. Des protestations en adresseront à la chambre l’énumération et la description. Parmi ces protestations, les unes seront livrées d’avance à la publicité, les autres se produiront sans doute au sein même du débat. Parmi les protestations qui exciteront l’intérêt le plus vif, il faut signaler celle que M. Casimir Perier vient de publier. L’élection, dans la première circonscription du département de l’Isère, n’a tenu qu’au déplacement de moins de 1, 400 voix. Ce déplacement a tourné au profit du concurrent de M. Perier. A quels moyens n’a-t-on pas eu recours pour appeler ces quelques centaines de voix autour du candidat recommandé par le préfet ! Dans cette élection, comme dans toutes celles qui ont été contestées, ce qui frappe avant tout, c’est le rôle actif joué par l’agent supérieur du pouvoir exécutif, par le préfet. A vrai dire, ce n’est point entre deux candidats que la compétition s’établit, c’est entre le préfet et le candidat de l’opposition ; ce n’est pas le candidat gouvernemental qui dispute les votes à son adversaire, c’est le préfet qui les brigue. La protestation de M. Perier, digne de la mâle fermeté que ce candidat a montrée durant l’élection, nous fait connaître les moyens qu’un préfet peut employer dans une telle lutte.
Un fait bizarre, c’est la façon dont est choisi le candidat gouvernemental. Il y avait un candidat naturel, l’ancien député, M. Arnaud. Celui-ci, dans une circulaire où il décline la candidature, annonce à ses concitoyens que c’est à son insu qu’il a été désigné pour les représenter au corps législatif. — Il est donc possible de devenir par désignation candidat sans le savoir ! — L’administration remplace dans son patronage M. Arnaud par M. Royer. Le préfet ne se borne point à désigner et à recommander le candidat officiel ; il entre en campagne pour lui, il entame la polémique contre son concurrent, et quelle polémique ! Dans une proclamation affichée, un agent supérieur du pouvoir se croit autorisé à dire d’un citoyen qui ne fait qu’exercer ses droits politiques qu’il répand à profusion des journaux et des libelles, qu’il n’épargne rien pour tromper la foi politique des électeurs ! Mais un préfet a d’autres ressources encore que les proclamations passionnées, il a les agens disciplinés de l’administration, il a aussi la distribution des faveurs et de certains dons aux communes. M. Perier publie des copies certifiées de lettres adressées à des maires par le préfet, à la veille de l’élection, pour annoncer des dons de diverse nature, des subventions, des travaux, ou pour promettre des chemins. Ce n’est pas tout : sur des ordres venus de Paris, une poursuite est dirigée