qui avait fait sa seconde ascension par un temps serein ou plutôt légèrement vaporeux et avait atteint à peu près la même hauteur, n’avait vu son thermomètre descendre qu’à 9,5 degrés au-dessous de zéro. La même température de 9,5 degrés fut reconnue cette fois à 6,000 mètres d’élévation; puis, à partir de ce point et dans une étendue de 600 mètres à peu près, sans transition, le thermomètre varia d’une manière tout à fait extraordinaire, et descendit jusqu’à 39 degrés. Jusqu’alors on avait cru que la température de l’atmosphère décroissait progressivement, et s’abaissait assez régulièrement d’un degré environ par 200 mètres d’élévation. Cette théorie ne peut plus être admise. Il paraît certain qu’il y a dans les régions supérieures de vastes espaces soumis à un refroidissement exceptionnel, et qu’il existe en quelque sorte des nuages de froid. Il est facile de comprendre que la présence de ces nuages doit jouer un grand rôle dans tous les phénomènes météorologiques et influer gravement sur le climat des contrées situées au-dessous. L’étude en serait donc profitable et féconde en conséquences. Il ne serait pas moins intéressant d’analyser les causes qui produisent ces températures très basses. Les explorations aériennes de 1850, loin d’épuiser le sujet, n’ont fait qu’indiquer un champ plus vaste aux explorations futures.
Par malheur, il est rare que l’on trouve réunies chez le même homme toutes les qualités nécessaires pour assurer le succès d’une expédition de ce genre, l’intrépidité et le sang-froid de l’aéronaute, l’expérience et la sincérité de l’observateur. Aussi les ascensions si fréquentes de nos jours servent-elles rarement les progrès de la science. On a cependant si bien perfectionné les instrumens que les observations sont plus faciles, et que l’aéronaute le plus ignorant peut les enregistrer sans peine et sans embarras. A la place des baromètres et des thermomètres, qui ne donnent des indications précises que s’ils sont maniés par un expérimentateur habile, M. Regnault a construit des appareils avec lesquels il n’y a plus qu’à tourner quelques robinets en notant soigneusement l’heure. Tout voyageur pourrait recueillir dans les espaces célestes des renseignemens utiles, quand même il serait distrait par la nouveauté du spectacle ou occupé aux manœuvres du ballon. Ce serait ensuite l’œuvre du savant de discuter et d’interpréter dans son laboratoire les indications recueillies pendant le voyage. Si la faveur du public remet en vogue, comme cela paraît probable, les exercices aérostatiques, il est à désirer que les aéronautes fassent usage de ces instrumens perfectionnés, et que la météorologie retire, elle aussi, sa part dans les profits du spectacle.
Les dépenses d’une ascension scientifique sont trop considérables