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questions générales, une atmosphère subtile et lumineuse, celle de l’élite du monde européen mêlée aux effluves de l’esprit parisien, les eût entourés et enveloppés; mais une réunion aussi exceptionnelle était-elle le seul ou le meilleur moyen de faire participer à ces grands débats la puissance de l’esprit public? La grande vie du régime représentatif loyalement et librement pratiqué n’offre-t-elle pas au gouvernement d’un peuple des ressources plus abondantes et plus constantes pour associer l’esprit national aux discussions des affaires étrangères, et pour asseoir ce qu’on pourrait appeler le crédit moral et politique de ce peuple au sein de la communauté européenne? Cette question mérite d’être sérieusement méditée: elle se présente naturellement à l’esprit au moment où notre nouveau corps législatif achève la vérification des pouvoirs.

Nous n’hésitons pas à le déclarer, la force morale de la France, la confiance générale, la sécurité de tous auraient beaucoup gagné, si le régime représentatif avait accompli en France depuis dix ans plus de progrès que nous ne lui en avons vu faire. Soyons sérieux, ne cherchons pas à nous flatter, et nous avouerons que la France n’a pas lieu d’être fière de ce grand procès des élections qui se déroule devant elle depuis trois semaines, et qu’elle ne peut guère en tirer vanité aux yeux du monde. Personne ne sortira satisfait de cette épreuve. La France avait accepté le décret du 24 novembre avec d’heureuses espérances comme un retour progressif à la vérité du régime représentatif. Les dernières élections étaient le premier appel qui eût été adressé au pays sous l’empire de ce décret; elles devaient être l’inauguration de l’ère nouvelle. Nous le demandons, qui n’eût été heureux de voir cette phase attendue comme plus libérale s’ouvrir sous de généreux auspices? N’y avait-il pas dans ces élections générales, à la condition qu’on les laissât s’accomplir avec un véritable esprit de libéralisme, une occasion de large conciliation? A marcher vers la liberté, supposé, comme on doit le croire, que nous y marchions, n’eût-il pas été plus agréable à la conscience publique, plus profitable à tout le monde, que la nouvelle période où nous entrions fût ouverte sous une influence radieuse? Serons-nous démentis si nous disons que, grâce à la direction imprimée aux élections par le dernier ministre de l’intérieur, notre début dans la voie nouvelle n’a rien eu dont le gouvernement, s’il pèse ses véritables intérêts, ait à se féliciter?

Nous n’avons ni l’envie ni peut-être le droit d’entrer dans l’examen détaillé de la vérification des pouvoirs ; nous n’avons pas à refaire ici le procès des élections qui ont été validées et de celles qui ont été annulées. Nous ne voulons nous permettre que quelques réflexions générales. Il faut dire d’abord que, l’opposition n’ayant présenté des candidats que dans un nombre restreint de collèges, le nombre des élections contestées qui ont donné lieu à des protestations devait être relativement minime. On a pu juger, par ce petit nombre d’exemples, du système général de l’administration en matière d’élections. Le défaut capital de ce système, celui qui