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LISETTE

Et vous en jouez?

DUBOIS

Certainement, petite!... Le valet de chambre d’un grand seigneur, son homme de confiance, doit être musicien, poète même dans l’occasion.

LISETTE

Qu’est-ce que c’est que ça, poète?

DUBOIS

C’est celui qui fait les paroles de vos chansons.

LISETTE

Nous allons commencer tout de suite, n’est-ce pas?

DUBOIS

Sans doute, ma charmante Lisette... Mais comment comptes-tu payer ton professeur?

LISETTE

Dame! monsieur Dubois,... je suis une pauvre fille,... je n’ai rien à moi.

DUBOIS

Tu te moques, Lisette : tu sais que tu es riche... en fraîcheur, en jeunesse...

LISETTE

Vous trouvez?

DUBOIS

Sournoise! tes galans te le disent tous les jours... Je ne veux pas me montrer exigeant : deux baisers, est-ce trop?

LISETTE

Alors vous voulez que je vous paie en embrassades?

DUBOIS

Certainement, (Il va à elle et l’embrasse a plusieurs reprises.)

LISETTE, s’échappant.

Assez, monsieur Dubois! A présent vous me devez au moins six leçons.

DUBOIS

Voyons, Lisette, je vais t’enseigner les figures de la contredanse.

LISETTE

Oh! je les sais déjà!... J’ai de l’amour-propre, voyez-vous; les paysans, ce n’est pas mon affaire : ce que je voudrais, c’est que vous m’apprissiez de quoi faire enrager les autres filles du village et pouvoir être invitée par vos messieurs de Paris.

DUBOIS

Tu veux parvenir. Je me charge de ton éducation, et pour commencer je vais ajouter à tes heureuses dispositions les grâces de notre danse nationale... Mais j’aperçois mon maître et sa belle-sœur : entrons dans la serre pour les laisser passer.

LISETTE, entrant dans la serre.

Danse-t-il bien, M. le comte?

DUBOIS, entrant avec Lisette.

Ah! Lisette, si tu l’avais vu autrefois, costumé en prince indien, au bal de