Soit; mais, depuis deux ans que j’ai disparu, je pouvais croire le duc Pompée hors de cause.
Tu es trop modeste; les hommes comme toi, qui ont rempli le monde de leurs brillantes folies, ne sont oubliés que le jour où ils sont remplacés... D’ailleurs le feuilleton était de Fernel.
Savez-vous que j’ai tremblé un instant qu’il ne fît suivre mon prénom de Pompée de mon nom de Joyeuse ! Quel coup pour Isabelle! car vous avez été témoin de l’effroi que lui inspire la réputation de Pompée. Et encore le portrait était-il d’un ami ! Tenez, je vous le dis sans exagération aucune, je sens qu’à ce frêle amour ma vie est attachée... On se passe d’un bonheur qu’on ignore; mais quand une fois on a goûté les joies de cet amour qui vit de confiance et d’estime autant que d’attrait et de volupté, y renoncer est impossible.
Eh! qui te parle d’y renoncer? Le sentiment que tu as inspiré à cette nature timide et tendre est indestructible. Le jour où aura lieu la découverte que tu redoutes, Isabelle trouvera dans son cœur des trésors d’indulgence pour le pécheur repentant. Prépare donc ton sang-froid, car mes nouvelles n’auront pas pour effet de calmer tes appréhensions.
Qu’est-ce?
Pompéa est ici.
Pompéa ici ! dans ce château !
Je viens de la quitter.
Mais par quel accident? par quelle perfidie?... Oh ! c’est un tour infâme!
Ménage tes expressions; le perfide auteur de ce rapprochement, c’est toi.
Moi!
Eh! oui, toi ! Quand on veut rester ignoré à Paris sous le nom d’Herman, on ne choisit pas, pour meubler son hôtel, les anciens fournisseurs du duc Pompée, Lebel surtout, le tapissier de Pompéa aussi bien que le tien. Elle est accourue, et je me suis heureusement trouvé le premier sur son chemin.
Alors vous avez obtenu d’elle qu’elle s’éloignât?
Tu en parles à ton aise! J’ai cru d’abord, en lui expliquant ta nouvelle situation, qu’elle céderait à mes remontrances; mais, étant si près de toi, rien n’a pu la résoudre à partir sans te voir,