Très sérieux.
Voilà une idylle qui a le défaut d’arriver trop tard; hier je t’aurais cru, mais il ne fallait pas me faire passer la soirée avec ta belle-sœur.
Je ne te comprends pas.
Est-ce qu’on nous trompe, nous autres? Tu es son amant. Du reste, je ne t’en fais pas mon compliment : elle est sans grâce, affectée. A ta place, ses œillades et ses roucoulemens m’ennuieraient.
Je te répète que tu la calomnies, et je te défends d’en parler davantage. En vérité, ta haine contre les femmes du monde te rend folle !
Ah! voilà le grand mot ! Les femmes du monde! Comment une artiste ose-t-elle parler d’une femme du monde,... la juger,... dévoiler ses intrigues?... Ne semble-t-il pas que nous vivions séparées d’elles par une muraille infranchissable?... Mais on ne t’a donc pas dit que, grâce à ton départ, je suis devenue l’idole de la bonne compagnie, l’amie inséparable des plus nobles demoiselles, dont je reçois les confidences? Eh ! quelles confidences! Veux-tu que je t’édifie sur la moralité de ces femmes que, dans ton orgueil, tu crois une race à part de la nôtre? Aussi bien ma curiosité, ma fierté sont satisfaites ; je suis lasse de leurs flatteries, dégoûtée de leurs caresses; je suis restée bohème, et je les hais comme lorsqu’elles m’accablaient de leurs dédains. (Elle s’arrêta et regarde un moment Herman.) Eh bien ! qu’as-tu à me regarder avec les yeux effarés de l’enchanteur de l’Ambigu devant le monstre qu’il a créé?
Tu me fais horreur, Pompéa.
C’est juste! L’horreur du vice pour servir de pendant au culte de la vertu ! Le beau rêve du serpent engourdi sous le ciel de la froide Allemagne et qui se croit devenu berger! Causons de ta Baucis, honnête Philémon.
Finis, je t’en supplie !
Et pourquoi finirais-je? Je n’en dis pas de mal; elle a l’air d’une bonne femme, elle ne voit rien, ne sait rien, n’entend rien : c’est le contraire du solitaire. Après ça, c’est maigre, c’est chétif ; elle ne te gênera pas longtemps.
Misérable)... (Moment de silence.)
Tu l’aimes donc bien qu’en l’insultant j’aie pu t’amener à me frapper! (Après une pause.) Tu l’aimes d’un amour inconnu, impérissable! Tu l’aimes d’un premier amour! Elle est ta femme, la mère de ton fils! Et moi, moi, misérable, moi, ta créature, ta chose, ton esclave dévouée jusqu’au crime ou jusqu’à