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de déclarer en mon âme et conscience que je blâme les changemens projetés, parce qu’ils détruisent la bonne organisation de l’école, qu’ils portent atteinte à des droits acquis et respectables, à un enseignement basé sur les grandes traditions classiques, pour ne mettre à leur place qu’un enseignement de fantaisie et d’aventure, des juges incompétens et une direction fausse dans les études. »

Et moi, je viens à mon tour déclarer, pour ce qui concerne l’école de Rome, que les réformes annoncées amèneront infailliblement son abaissement et sa ruine. C’est l’espoir de quelques esprits chagrins, qui n’ont jamais caché ce vœu digne des barbares ; mais ce serait l’affliction de tous les honnêtes gens, qui considèrent l’Académie de France à Rome comme une institution nationale, d’où sont sortis nos plus beaux talens, et qui n’a survécu à toutes les révolutions que pour mieux constater la vitalité du génie français. S’il nous reste encore une gloire non contestée, c’est celle des arts : ne la compromettons point follement en répudiant deux siècles d’un passé fécond, en tranchant l’avenir dans sa fleur. Ce serait pour l’Europe elle-même un sujet de stupeur. Que tous ceux qui aiment le beau, leur pays, la jeunesse, s’unissent pour former ce concert de voix convaincues qui s’appelle l’opinion publique, et qui, s’il ne persuade pas toujours l’administration, la force du moins à réfléchir.

BEULE,

Secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts.