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gie d’un sentiment sincère, doivent être prodigués aux discours des chefs de l’opposition française. » Cet hommage, rendu par des étrangers à la supériorité de l’éloquence politique de la France, pourrait-il trouver insensibles ceux qu’anime d’un noble orgueil le sentiment de nos gloires nationales ? N’est-ce point parmi ces gloires une des plus pures et des plus bienfaisantes, une de celles auxquelles le génie français doit son ascendant moral sur le monde, qui vient de nous être restituée ? Et comment le gouvernement qui préside aux destinées de la France et qui a rendu la parole à l’éloquence politique ne participerait-il point à l’honneur que les dernières discussions parlementaires ont fait au pays ? De l’aveu de tous, le débat de l’adresse de 1864 est une des pages les plus belles de notre histoire parlementaire. Une manifestation de cette nature n’est-elle point une parure pour l’histoire d’un règne ? et comment un gouvernement intelligent, un gouvernement véritablement inspiré de l’esprit moderne, pourrait-il, d’un esprit chagrin, se soustraire à ce lustre ? Certes le premier empire a eu bien des gloires ; mais il lui a manqué celle qui s’offre aujourd’hui au second empire. Les élémens d’une gloire pareille ne lui faisaient pas défaut ; en face de Napoléon Ier, il est permis à l’imagination de rêver une assemblée où des hommes tels que Royer-Collard, Chateaubriand, de Serre, Benjamin Constant eussent débattu les affaires publiques avec les Portalis, les Mollien, les Daru, une assemblée qui eût mis en présence d’un grand génie l’épanouissement libre et spontané de l’esprit français. Malheureusement pour lui et la France, Napoléon n’eut ni l’intelligence ni le goût de cette sorte de gloire ; à l’épreuve des contradictions éloquentes il préféra le monologue de son inquiet génie, aboutissant dans l’action à l’omnipotence outrée qui le conduisit au naufrage.

Deux motifs nous empêchent de revenir en détail sur les questions intérieures et extérieures qui ont été traitées dans la discussion de l’adresse. Le premier de ces motifs est le péril du compte-rendu extra-légal suspendu sur la presse ; le second est l’inopportunité qu’il y aurait à effleurer à la fois tant de sujets qui viennent d’être soumis aux investigations approfondies des plus habiles orateurs. Pour les questions intérieures, que trouverions-nous à dire sur les candidatures officielles après les discours de MM. Thiers et Jules Favre, sur l’instruction primaire après M. Jules Simon, sur la liberté de la presse après MM. E. Pelletan, Jules Simon et Ollivier ? Pour les affaires étrangères, que pourrait-on ajouter sur la question mexicaine au merveilleux exposé de M. Thiers, sur la question polonaise à la noble revendication du droit présentée par M. Jules Favre ? D’ailleurs, dans les questions étrangères, nous sommes bien plus préoccupés de l’examen des responsabilités futures auxquelles nous pouvons être exposés que de la critique d’un passé auquel nous n’accordons pas, il est vrai, l’autorité de la chose jugée qu’invoque M. Chaix-d’Est-Ange, mais dont les faits accomplis sont irrévocables et irréparables. Ce n’est qu’au point de vue des fautes dont il faut prévenir le retour que nous retenons, comme on