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contre la Russie, entreprise à l’instigation de la France, avait montré que la Suède était devenue incapable de toute démonstration offensive, et, pendant la récente guerre de sept ans, les intrigues ourdies à Stockholm avaient détruit à l’avance tout le résultat qu’on pouvait espérer d’une diversion bien combinée. Ces diverses expériences permettaient de conclure qu’une Suède « aristocratique, démocratique et platonique » n’offrirait jamais à notre alliance un appui solide.


« D’après ce que je viens de vous exposer, ajoutait le duc de Choiseul, le roi vous ordonne de faire usage de vos connaissances et de vos talens afin de former un projet de conduite qui tende : 1° à rétablir le pouvoir monarchique en Suède par l’influence de la France (je ne présume pas qu’il vous soit difficile de concerter à ce sujet un plan avec le roi et la reine de Suède et leurs confidens), 2° à obtenir de nos amis qu’ils adoptent ce parti et y concourent de bonne fol. Quant aux subsides, le roi, étant instruit par les faits combien la couronne de Suède a manqué aux engagemens contractés envers la France, et même aux égards dus à la considération et à l’ancienneté de son amitié, ne croit pas être obligé à tenir tout seul des engagemens qui ont mérité si peu l’attention du gouvernement suédois. Ce gouvernement trouvera sans doute des ressources dans ses nouveaux amis. Le roi n’en sera pas jaloux, et lui laisse toute liberté à cet égard. »


Le duc de Choiseul ajoutait, dans une dépêche complémentaire du 4 mai 1766 :


« Non-seulement sa majesté ne paiera point à la Suède des subsides qu’elle ne croit plus lui devoir, mais elle s’embarrasse encore fort peu de la durée plus ou moins longue de la diète assemblée à Stockholm. Nous verrons si l’Angleterre, qui partage pour le moins avec le roi l’amitié et l’attachement de la Suède, partagera de même le fardeau des subsides, ce dont je crois qu’il est permis de douter. »


Désormais donc la scène change ; les anciens partis, tombés dans le discrédit, vont se dissoudre pour laisser place à un grand parti royaliste, vers lequel affluera tout ce qui reste de forces vives à la Suède. Le rôle particulier de Gustave dans cette lutte suprême va se concerter étroitement avec les efforts du gouvernement français, et l’entier succès de l’œuvre commune sera dû finalement à l’intelligente énergie du prince royal.


A. GEFFROY.