pour en chercher une autre. Pitcairn et l’île de Pâques nous présentent des exemples de cette nature. Bien des expéditions ont certainement péri, et la tradition a conservé le souvenir de quelques-uns de ces désastres ; mais d’autres atteignaient une terre quelconque, et c’est ainsi sans doute qu’ont eu lieu les anciennes colonisations dont nous parlerons plus loin.
Les hasards de la mer, avons-nous dit plus haut, ont dû jouer aussi leur rôle dans le peuplement de l’Océanie et disséminer des colons dans cette mer toute parsemée d’îles. Ici, pour citer des exemples, on n’a que l’embarras du choix. Presque tous les grands navigateurs européens ont rencontré dans les îles qu’ils visitaient des étrangers arrivés là par accident et parfois de fort loin. Je leur emprunterai seulement trois faits intéressans à divers titres.
Lorsque Cook aborda à Watiou en 1777, il était accompagné du Tahitien Maï, et celui-ci trouva dans cette île, placée au sud-ouest, après de 1,200 kilomètres de Tahiti, trois hommes qu’au premier mot il reconnut pour des compatriotes. Leur histoire était fort simple. Partis au nombre de vingt de Raïatéa, île du même groupe que Tahiti, mais plus à l’ouest, pour se rendre dans la grande île, ils avaient été surpris par une tempête et jetés en pleine mer. Complètement égarés, ils avaient erré au hasard. Dix-sept étaient morts de faim ou de misère. Les trois autres avaient rencontré Watiou et y vivaient depuis douze ans. — Ici les naufragés sont peu nombreux et d’un seul sexe. Ils n’auraient pu former les élémens d’une colonie. Voici un fait plus concluant.
Dans le voyage qu’il accomplit de 1825 à 1828, le capitaine Beechey découvrit vers l’extrémité de l’archipel Pomotou une petite île ou plutôt un îlot, l’île Barrow, où il fut surpris de trouver des traces d’habitations récentes. Arrivé plus tard dans l’île Byam-Martin, il y rencontra une quarantaine d’individus, hommes, femmes, enfans, sous la direction de deux chefs, dont l’un, nommé Touwari, fut emmené avec sa famille par le navigateur anglais. Tous étaient originaires de l’île Chaîne ou Anaa, située à environ 400 kilomètres à l’est de Tahiti, dont elle est tributaire. Leur histoire était celle des naufragés de Watiou. À l’avènement de Pomaré, Touwari s’était embarqué avec cent cinquante de ses compatriotes pour aller rendre hommage au nouveau souverain. En vue de Maïtéa[1], la mousson venue plus tôt que d’ordinaire avait renversé le vent alizé, et les avait rejetés en mer. Deux pirogues s’étaient perdues. La troisième, portant vingt-trois hommes, quinze femmes et dix enfans, avait erré au hasard. C’étaient eux qui avaient abordé à
- ↑ Île placée également à l’est de Tahiti.