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SILVA
POESIES[1]


UN PASSAGE D’ABEILLES.


Tandis que, fatigué d’une route poudreuse,
Je goûte le repos sous de frais rameaux verts,
Abeilles en essaim, troupe mélodieuse,
Vont traversant les airs.

Quelque temps le doux bruit que font leurs vives ailes
Enchante mon oreille, et quelque temps aussi
Je vois leurs corps légers briller comme étincelles
Sur le fond obscurci.

Où vont-elles s’abattre ? En tous lieux où fleurettes
Exhalent leur parfum, étalent leur émail,
Car, depuis que l’aurore a blanchi leurs retraites,
Elles sont au travail.

O mouches ! votre corps est petit à l’extrême,
Mais votre esprit est grand, et vous tenez du ciel
Des ailes, bouche d’or, et la faveur suprême
De changer tout en miel.

Vous possédez le son, la couleur et le baume,
Et vous n’abusez pas de ces dons précieux.
Aussi tout ce qui sort de votre doux royaume
Est-il délicieux.

  1. L'ensemble des pièces réunies sous ce titre fait partie de poésies diverses que doit publier prochainement M. Auguste Barbier.