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ressans restent encore à résoudre. On est, il est vrai, parvenu à rendre l’extraction du coke incandescent, résidu de chaque opération, plus prompte et moins pénible en le faisant tomber directement, au sortir des cornues, dans un sous-sol largement ventilé, où l’on achève de l’éteindre par aspersion au moyen d’un tube flexible terminé par une pomme d’arrosoir. C’est là une amélioration heureuse dans l’intérêt de la santé des ouvriers[1] ; mais il y a encore des inconvéniens à faire disparaître. Après le déchargement des cornues, la haute température qu’elles ont acquise, et qui est utile tout à la fois au succès de l’opération suivante et à l’incinération de la couche interne de charbon, très adhérente aux parois, n’en a pas moins de sérieux inconvéniens lorsqu’il faut procéder à un nouveau chargement. En effet, la longueur des grandes cornues à section elliptique dépasse 4 mètres, et chacune d’elles doit recevoir à la fois par les deux extrémités une charge de 200 kilogrammes de houille. Or, malgré la force et l’adresse des ouvriers, il s’écoule quelques minutes avant que le chargement soit complet et que les obturateurs en tôle fermant les deux ouvertures aient pu être solidement fixés. Pendant cette difficile manœuvre, la décomposition de la houille commence, et il se dégage en pure perte un volume considérable de vapeurs fuligineuses et insalubres. En outre la surabondance du dégagement gazeux, continuant après la fermeture des cornues, entraîne beaucoup de goudron et de poussières charbonneuses. Ainsi se produisent dans les premiers tubes de dégagement des obstructions qui déterminent des fuites par tous les joints. On entrevoit bien les moyens d’améliorer cet état de choses, mais il reste à faire sur ce point de sérieuses et importantes études.

Les doubles cornues dont nous venons de décrire le service sont établies au nombre de sept sous une des voûtes de chaque four : chauffées par un seul foyer, elles produisent en quatre heures environ 350 mètres cubes de gaz, ce qui correspond à une production moyenne de 2,100 mètres cubes en 24 heures. Chaque massif de maçonnerie, renfermant 10 fours semblables, peut donc produire

  1. Il y a quelques années encore, j’ai pu voir à l’usine royale de la rue Rochechouart les ouvriers des fours, après avoir été exposés à la chaleur rayonnante intense du coke incandescent qu’ils retiraient des cornues, courir, aussitôt leur rude tâche accomplie, encore demi-nus et tout ruisselans de sueur, se courber au-dessus de baquets disposés à cet effet, où un de leurs camarades versait immédiatement sur leur dos un seau d’eau froide. Chose remarquable, la réaction produite par l’extrême chaleur qu’ils venaient d’endurer était telle que l’abondante et froide aspersion ne produisait pas en eux un abaissement de température nuisible à leur santé. Toutefois ce n’est jamais sans quelque danger que l’homme se trouve journellement soumis à de pareilles épreuves, et il est fort heureux que cette manœuvre si pénible soit amenée aujourd’hui à des conditions bien plus supportables.