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1863 par les dissidences inévitables et croissantes d’un parti factice. Après lui est venu un ministère présidé par le marquis de Miraflorès, et des élections générales se sont faites. Quelle était la couleur de ce ministère ? Il avait de la peine à définir lui-même sa propre couleur ; il avait adopté pour programme, selon ses déclarations, « une politique éminemment conservatrice et éminemment libérale, » ce qui est plus facile à mettre sur un programme qu’à pratiquer. Le fait est que le jour où, après les élections, les chambres se sont réunies de nouveau, lorsqu’une question sérieuse s’est élevée, le ministère Miraflorès a sombré, et il est tombé pour avoir voulu résoudre une question qui est restée dans la politique intérieure de l’Espagne comme un perpétuel embarras. Il y a sept ans, un ministère qui ne se croyait conservateur qu’à ce prix eut l’étrange idée de vouloir réformer la constitution. Il fit voter quelques nouveaux articles constitutionnels, qui introduisaient l’élément héréditaire dans le sénat, en attendant une restauration des majorats à l’appui de cette hérédité nouvelle, et qui fixaient que les règlemens des deux chambres seraient l’objet d’une loi. Ce n’était pas tout de voter le principe de cette modification fondamentale ; il fallait en venir au rétablissement des majorats et au règlement des deux chambres. C’est ce qui s’est appelé depuis quelques années au-delà des Pyrénées la question de la réforme constitutionnelle. Le cabinet O’Donnell a toujours hésité à la résoudre. Le ministère Miraflorès proposait tout simplement d’en finir en maintenant l’hérédité telle qu’elle existait dans le sénat et en écartant définitivement tout le reste. C’est sous le poids de cette difficulté qu’il tombait il y a moins de deux mois, et à sa place venait un ministère présidé par un magistrat éminent, quoique peu désigné pour la direction des affaires, M. Lorenzo Arrazola. Celui-là s’annonçait comme le promoteur de la réorganisation des partis constitutionnels et comme représentant, quant à lui, le parti modéré historique, suivant un mot récemment imaginé. Cela ne voulait pas dire grand’chose, et lorsque ce ministère a essayé de faire un pas, il est allé rejoindre le ministère Miraflorès ; il est tombé même avant toute discussion publique. Alors est venu, et il y a de cela quinze jours, un cabinet nouveau formé par M. Mon, où figurent des hommes d’un passé considérable, comme M. Joaquin Francisco Pacheco, et d’autres plus jeunes dans la politique, comme M. Canovas del Castillo.

Voilà donc quatre ministères. Le premier avait duré cinq ans lorsqu’il est tombé ; le ministère Miraflorès a duré dix mois, le ministère Arrazola a vécu quelques jours. Le ministère de M. Mon entre à peine au pouvoir. Pour que chacun de ces cabinets ait sa politique distincte, il faut assurément qu’il y ait bien des politiques en Espagne. Au milieu de toutes ces confusions néanmoins, il y a un fait sensible et éloquent : c’est la nécessité d’un gouvernement libéral pour l’Espagne. Tout ce qui s’en éloigne est un péril et ne rencontre qu’un médiocre appui. Un ancien ministre, M. Nocedal, a prêché un semi-absolutisme dans le congrès il y a deux mois, et il a