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de la chromo-lithographie ou impression en couleur. Les teintes de diverses couleurs rentrent dans la classe des signes conventionnels dont il a été question plus haut. Elles ont été employées depuis longtemps sur les cartes vulgaires pour marquer les limites des états. On a été amené peu à peu à en faire un usage plus délicat et plus complexe. Ainsi les teintes servent à indiquer sur les cartes géologiques la nature variée des sols. Dans les pays montagneux, un coloris léger étalé sur les vallées fait ressortir plus nettement les ondulations du territoire. On commence même à introduire le dessin en couleur dans les œuvres topographiques les plus soignées, afin d’éviter que trop d’indications réunies dans un cadre restreint ne nuisent à la clarté. Il devient possible, grâce aux nuances, de diminuer la dimension des feuilles sans sacrifier des détails essentiels. La fabrication matérielle des cartes n’a pas fait en définitive moins de progrès que la science topographique proprement dite : il reste à examiner dans quelles limites ces perfectionnemens ont été appliqués.


IV.

La topographie fut dans l’origine une branche accessoire de l’art militaire. Pour combiner les mouvemens stratégiques d’une armée, choisir un champ de bataille favorable, apprécier les travaux de défense les plus propres à couvrir une frontière, le général doit connaître le terrain où il opère. Il faut qu’il soit renseigné sur la raideur des pentes, sur le tracé et la viabilité des routes ; il faut même qu’il sache quelles cultures recouvrent le sol. Les cartes furent donc tout d’abord dressées au point de vue de l’utilité qu’elles ont pour la guerre, et, conséquence naturelle, on crut longtemps qu’elles devaient être conservées secrètement comme les documens qui importent à la défense du territoire. Les cartes réduites, qui représentaient une grande contrée sur une feuille de médiocre étendue, ne pouvaient être établies que sur des observations astronomiques souvent imparfaites, et plus souvent encore sur des évaluations arbitraires qui ne méritaient aucune confiance. On a maintenant des idées moins exclusives sur l’utilité des études topographiques. Elles sont encore d’un usage fréquent à la guerre, et la preuve en est que dans presque tous les états de l’Europe les ingénieurs géographes appartiennent à l’armée; mais on a senti que les cartes doivent être livrées à la publicité pour le profit de toutes les classes de la société, pour l’ingénieur qui y étudie les projets de route, pour l’industriel qui fait construire une usine sur le cours d’une rivière, pour l’administrateur et le magistrat dont elles guident les inves-