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du Mont-Cenis, uniquement dirigé par des Italiens, excite la plus vive curiosité dans toute l’Europe. Il en est de même des études ou des travaux poursuivis dans les divers passages des Apennins. On ne s’étonnera point de ces résultats, si l’on réfléchit que l’art de l’ingénieur est ancien dans la péninsule : ces mêmes artistes du XVIe siècle, qui ont laissé des peintures ou des sculptures admirables, fortifiaient les villes, dressaient des cathédrales gigantesques, et modifiaient par des travaux habiles le régime des canaux ou des rivières.

En même temps que les chemins de fer, d’autres travaux se poursuivent. L’état fait beaucoup de routes : il en fait trop peut-être par lui-même, car la loi du 23 octobre 1859 a mis à la charge du trésor, dans le Piémont, dans la Lombardie et dans les duchés, les routes qui sont ordinairement laissées à l’initiative locale, et qui le sont en effet dans le reste du royaume. Les provinces du midi ont reçu, dans le cours de l’année 1863, 20 millions à titre de subvention pour construire des chemins. — Des soins intelligens ont été donnés à tout ce qui peut aider la navigation. La mer est en effet comme une grande route qui dessert une bonne partie des villes italiennes. On a amélioré non-seulement les grands ports. Gênes, La Spezzia, Livourne, Naples, Brindes, Ancône, mais encore une foule de ports secondaires et de havres inférieurs. On songe à perfectionner par de grands travaux le régime du Pô et de ses affluens. Le Pô sert en effet à une navigation intérieure qui, en se développant, peut rendre les plus grands services à la Haute-Italie : par cette voie, des bâtimens pontés remontent des rives de l’Adriatique jusqu’à Pavie et à Milan, où ils se rencontrent avec les barques venues des lacs alpestres. Parmi les travaux auxquels le Pô doit donner lieu, il faut citer en première ligne le canal Cavour. Ce grand canal, qui coûtera 53 millions et qui sera sans doute achevé dans deux ans, sortira du Pô près de Chivasso et répandra d’abondantes irrigations dans la grande plaine carrée qui est bornée au nord par les Alpes, au sud par le fleuve, à l’orient par le Tessin et à l’occident par la Dora-Baltea; il permettra en même temps de reverser sur la rive lombarde une partie des eaux du Tessin. On n’estime pas à moins de 10 millions la plus-value annuelle que cette immense entreprise doit donner aux terrains qui en bénéficieront.

La principale richesse de l’Italie a jusqu’ici consisté dans les produits naturels de son sol. Les agriculteurs italiens ont depuis longtemps une très bonne opinion de leurs travaux et de leurs méthodes. Sous l’ancien régime politique, ils étaient réduits à opérer isolément, et l’expérience acquise par les uns ne profitait guère aux autres. Ils s’éclairaient peu par l’étude des améliorations réalisées à