Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 51.djvu/497

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

a montré qu’elle pouvait faire un usage utile de la prérogative qui lui a été accordée. Qu’on se rappelle seulement l’effet moral produit au commencement de cette session par le rapport de M. Larrabure. Si quelques sessions successives devaient s’ouvrir par des impressions semblables, le gouvernement tarderait peu à ressentir le contrôle du corps législatif en matière de crédits supplémentaires. À notre avis donc, M. Vuitry a eu raison d’insister sur l’importance politique du nouveau système de comptabilité législative. Si M. Fould a eu l’initiative de ce système, il a rendu un service positif et durable à la bonne gestion des finances et au régime représentatif parmi nous ; convenons en outre de bonne grâce que le jour où il a soumis à l’empereur le principe de cette réforme, il a montré qu’il n’était pas dépourvu au besoin d’une certaine férocité.

M. Berryer a établi un utile précédent en abordant, à la suite du débat du budget des dépenses, la discussion du budget des recettes. L’illustre orateur a porté dans l’examen des ressources un esprit pratique et sagace, et cet accent de sincérité qui est un des charmes de sa parole. Les ressources prévues se réaliseront-elles ? L’examen de cette question conduit à évaluer la sûreté de quelques-unes des ressources annoncées, et à rechercher l’intluence que les circonstances économiques où se trouve le pays peuvent exercer sur la réalisation des autres. Dans le premier ordre se plaçaient les restitutions qui nous sont promises par le nouvel empereur du Mexique. Une question de M. Berryer a aussi amené M. Boulier à donner d’intéressantes explications sur les résultats de l’emprunt mexicain. La souscription de cet emprunt, si l’on ajoute les 6 millions de rente attribués à la France aux 12 millions émis pour le Mexique lui-même, n’a été couverte qu’à moitié. Nous regrettons cet échec, car il semble que les 60 millions que le trésor comptait tirer de ses rentes mexicaines seront difficiles à réaliser prochainement et sans perte. C’était sur cette ressource pourtant que l’empereur avait compté pour suppléer au produit du second décime, dont les droits d’enregistrement vont être dégrevés. Il y a là dès à présent un mécompte. L’émission de l’emprunt mexicain ne s’est point faite, suivant nous, avec la prudence et les précautions qu’exigeait une opération à la fois aussi considérable et aussi délicate. Il était d’une extrême importance, du moment où l’on avait résolu un emprunt mexicain, d’en assurer l’éclatant succès. La complète réussite eût donné du prestige au nouvel établissement impérial, et eût imprimé peut-être une impulsion vivifiante à l’œuvre que l’on tente au Mexique. Pour assurer ce succès, peut-être eût-il fallu émettre l’emprunt à un prix encore moins élevé, et obtenir des concours financiers dont l’influence et l’exemple eussent pu vaincre les hésitations du public. Souscrire à un emprunt mexicain reposant sur la tête d’un prince en route sur l’Océan pour aller gouverner un pays qui lui est encore inconnu, c’est faire un des actes de foi financière les plus complets qu’on ait pu voir, même dans l’époque présente, où l’appétit des gros re-