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LE
SALON DE 1864

L’aspect général de l’exposition de 1864 n’est point rassurant, car, sauf quelques tentatives ingénieuses ou hardies, on y retrouve encore presque toutes les tendances inférieures qu’il avait déjà fallu signaler dans le Salon de 1863. La même préoccupation des petits effets s’y remarque; on dirait que la plupart des peintres, cherchant un succès de surprise, n’ont eu d’autre objet que de piquer la curiosité du public, afin d’arriver à vendre plus facilement leurs tableaux. Il me semble que l’art, tel qu’il a été compris par les maîtres, a quelque chose d’immuable et de permanent qui le rend supérieur au temps où il se produit et même aux hommes dont il émane. Aujourd’hui il n’en est plus ainsi : c’est simplement l’expression plastique des mœurs de notre époque dans ce qu’elles ont de plus frivole, c’est-à-dire dans la mode. L’ensemble de l’exposition actuelle pourrait se résumer ainsi : imitation de l’imitation. De quelques excentricités, de quelques incorrections qu’un peintre se rende coupable, soit qu’il obéisse à la fatalité mal combattue de son tempérament, soit qu’il veuille attirer quand même l’attention sur son œuvre, il est certain qu’il rencontrera des imitateurs et des admirateurs parmi ces hommes qui, ne comprenant rien à la mission d’un artiste, s’imaginent que, sans innéité, sans travail, sans intelligence, on peut arriver à gravir le dur escalier de la réputation. Dès qu’un peintre expose un tableau où l’on distingue seulement quelques singularités de coloration, et qui s’éloigne absolument des règles les plus élémentaires du dessin et de la composition, on est certain de voir marcher sur ses traces, avec applaudissemens, tous ceux qui ne savent ni dessiner, ni composer. Nous pourrions aujourd’hui citer beaucoup de ces