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d’aborder l’Afrique par ce côté inhospitalier. Ils méditaient une nouvelle expédition dans laquelle ils se proposaient de prendre leur revanche, lorsqu’ils reçurent de la société dont ils étaient les mandataires l’ordre de se rendre à Zanzibar pour en faire leur point de départ et leur centre d’opération, cette ville offrant plus de ressources que tout autre point du littoral pour mener à bonne fin l’entreprise. Ils partirent immédiatement, le 2 décembre 1856, et en dix-huit jours furent transportés à Zanzibar. Ils y restèrent six semaines, qu’ils employèrent à faire des excursions préparatoires le long des côtes, et à prendre tous les renseignemens possibles soit auprès des marchands arabes, soit auprès des nègres fugitifs, esclaves ou libres, que cette ville renferme en nombre considérable. Ils se rendirent aussi au siège de la mission anglicane, où le révérend Rebmann n’épargna rien pour leur donner sur le pays et sur ses habitans toutes les informations utiles. De tout ce qu’ils avaient pu voir, lire et entendre, ils conclurent que cette partie de l’Afrique qu’ils devaient explorer était attaquée de trois points différens par le commerce au moyen de caravanes assez nombreuses pour pouvoir au besoin livrer un combat aux naturels qui tenteraient de les attaquer. La première tête de ligne est à Tonga, ville maritime située sous le 5° 25’ de latitude sud. Les caravanes qui en partent se dirigent vers le nord-ouest, traversent l’Ousambara, laissent à leur gauche le Robeho, qui a près de six mille pieds d’altitude, à leur droite, mais plus au nord, les monts Kilimandjaro, et, faisant une percée au travers des redoutables tribus du Masaï[1], arrivent à Ururi, sur les bords du lac d’Ukéréwé, point de repère des marchands d’ivoire de ces contrées. La seconde tête de ligne est à Bagamoyo, à l’opposite de Zanzibar. Les caravanes qui partent de ce point font d’abord un coude vers le midi, puis remontent vers le nord, s’arrêtent à Kaseh, centre commercial de l’Unyamuesi, pour se diriger ensuite en droite ligne à l’ouest jusqu’à Ujiji, sur le lac du même nom, autrement appelé Tanganika. Le troisième point est à Quiloa, port de mer sous le 9e degré de latitude sud. Les marchands qui l’habitent se rendent aussi à Kaseh, non sans faire de nombreux zigzags, sans doute pour éviter les tribus suspectes.

Se trouvant assez riche d’informations, le capitaine Burton, accompagné de son ami, inaugura sa mission par un voyage dans l’Ousambara avec le désir de pousser une reconnaissance jusqu’aux pics du Kilimandjaro, qu’il était chargé d’étudier. Ils partirent de

  1. On appelle de ce nom une vaste contrée inexplorée, et jusqu’à ce jour inaccessible aux voyageurs, qui s’étend de la chaîne des montagnes qui bornent à l’ouest le Zanguebar jusqu’aux régions des lacs parcourues par le capitaine Speke. C’est la raison qui l’a obligé de faire un circuit considérable vers le sud pour atteindre ces régions.