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corporation appelée la maison de la Trinité. » Ce monument a été érigé par ladite corporation en 1622, quatre-vingt-un ans après la mort de celui dont on voulait honorer la mémoire. Ce sir Thomas Spert était un grand favori d’Henri VIII, et c’est d’après ses conseils que le roi fonda ou plutôt constitua Trinity House.

La reine Élisabeth confirma l’existence de cette société maritime par un acte du parlement. Des chartes lui furent ensuite octroyées par Jacques Ier, Charles II et Jacques II. J’ai vu dans les bureaux de l’institution ces vénérables parchemins religieusement conservés au fond d’une vieille boîte en chagrin noir. Que se proposaient les auteurs de ces nouvelles chartes ? Expliquer les libertés, franchises et privilèges de la société, assez vaguement indiqués par Henri VIII. Bien loin d’étendre la juridiction de la confrérie, on ne fit guère que lui assigner des bornes. Définir un pouvoir, n’est-ce point le limiter ? La société devait d’abord exercer une surveillance, non-seulement sur la marine marchande, mais aussi sur la marine de l’état. Ce dernier privilège se trouva restreint du temps même d’Henri VIII, lorsque ce roi institua des commissaires pour inspecter les vaisseaux de guerre. Trinity house conservait pourtant encore sous son règne, et même sous les règnes suivans, quelques branches de la police maritime qui passèrent peu à peu dans d’autres mains. Sa constitution fut aussi plusieurs fois remaniée. La société se divise aujourd’hui en frères aînés, Elder Brethren, et en frères cadets, Younger Brethren. Cette distinction n’existait point du tout à l’origine. D’après l’acte de fondation, tous les marins d’Angleterre étaient appelés à faire partie de cette société, tous y étaient représentés et concouraient à la rédaction des lois. La charte d’Henri VIII était donc, comme on dirait aujourd’hui, entièrement démocratique ; celles qui suivirent ont effacé peu à peu ce caractère. La différence entre les frères aînés et les frères cadets s’introduisit sous le règne de Jacques Ier. Ce roi autorisa le maître, les directeurs et les assistans de Trinity House à choisir dans l’association des marins dix-huit personnes qui porteraient désormais le titre d’Elder Brethren. Ce fut la source de la présente hiérarchie. La même charte interdisait pour la première fois aux frères cadets de voter les lois et règlemens relatifs aux affaires de la compagnie ; elle leur reconnaissait pourtant le droit de prendre part aux délibérations toutes les fois qu’il s’agirait de nommer ou de destituer le maître et les directeurs. Plus tard, les chartes de Jacques II et de Charles II ne leur laissèrent que le droit de nommer et non celui de destituer les membres du conseil. Ceux qui se rendaient à ces élections recevaient pour leur peine une demi-couronne (3 francs), au lieu d’un dîner. Avec le temps, ce dernier pri-