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nèrent sa destitution. Déjà deux fois depuis la bataille d’Antietam, le général Burnside avait, par un sentiment de modestie, refusé de prendre la succession de Mac-Clellan ; mais après l’ordre du jour du 7 octobre il n’hésita plus. Renvoyé dans ses foyers, le général Mac-Clellan perdit bientôt son titre de jeune Napoléon pour n’être plus qu’un simple citoyen, aspirant, comme tant d’autres, au fauteuil présidentiel.

Les rigueurs du froid n’interrompirent point les opérations militaires sur tous les points du territoire où les armées ennemies se trouvaient en présence : elles furent activées au contraire, principalement dans le voisinage de Washington, à cause de l’impatience générale qui se manifestait par les journaux, et, depuis le 1er décembre, par les discussions du congrès. Sachant qu’un temps précieux avait été perdu pour l’offensive après la victoire d’Antietam, l’opinion publique exigeait impérieusement une nouvelle et rapide campagne contre Richmond ou du moins l’abandon de cette stratégie expectante qui menaçait d’éterniser la guerre. De toutes parts on criait au général Burnside de marcher en avant. Du reste, le nom seul du successeur de Mac-Clellan semblait un gage de succès. C’est à Burnside que les fédéraux avaient dû un de leurs premiers succès militaires, la conquête du littoral et des baies intérieures de la Caroline du nord. Officier prudent, résolu, d’une persévérance à toute épreuve, il était aussi très soigneux du bien-être des soldats; lors de la prise du pont de l’Antietam, il s’était distingué non moins par sa sollicitude pour les troupes engagées que par sa bravoure héroïque. On espérait que, malgré les clameurs de l’opinion demandant à tout prix une victoire, il n’aurait garde de s’aventurer témérairement.

Les deux armées de Burnside et de Lee, se trouvant en présence à peu près à moitié chemin de Washington et de Richmond, n’étaient séparées l’une de l’autre que par le cours du fleuve Rappahannock.. Les fédéraux occupaient la rive septentrionale, non loin d’Acquia-Creek, baie de l’estuaire du Potomac, d’où ils tiraient leurs approvisionnemens par un chemin de fer long de 15 kilomètres à peine; les confédérés s’étaient retranchés à près de 2 kilomètres au sud du Rappahannock et de la ville de Fredericksburg, sur des collines élevées, position dont toute la formidable importance fut comprise plus tard. Le 11 décembre, après avoir attendu pendant près d’un mois le matériel nécessaire au passage du fleuve, le général Burnside commença son mouvement d’attaque en jetant cinq ponts de bateaux sur le Rappahannock. Cent cinquante pièces de canon placées en face de Fredericksburg délogèrent les tirailleurs ennemis et détruisirent une partie de la ville. Le 12, les troupes de l’Union se trouvaient toutes sur la rive méridionale du fleuve; mais ce fut un