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prochaine impuissance. Il faut également signaler un fait très important, mais dont la signification réelle n’est pas encore connue. Pendant que les deux armées ennemies s’entre-choquaient sur les collines de Gettysburg et que les autorités de Richmond se préparaient à proclamer une autre grande victoire de leurs troupes, le vice-président de la confédération esclavagiste, M. Alexander Stephens, débarquait à la forteresse Monroe et demandait au gouverneur l’autorisation de remonter le Potomac jusqu’à Washington, afin de porter au président Lincoln une communication de M. Jefferson Davis. Quelle était la mission dont le second personnage des états du sud, oublieux de tous les us diplomatiques, avait consenti à se charger auprès du chef du gouvernement régulier de la république américaine? Selon les vagues explications fournies plus tard par le cabinet de Richmond, M. Stephens n’aurait eu d’autre but, en demandant une entrevue au président Lincoln, que de régler avec lui de la manière la plus humaine les conditions de l’échange des prisonniers; mais il est peu probable que telle ait été la véritable cause de la démarche des chefs du gouvernement esclavagiste, car de pareilles questions peuvent être parfaitement débattues par les parlementaires de l’armée, et d’ailleurs il est évidemment impossible d’arriver à une solution satisfaisante tant que les généraux du sud se mettront au-dessus du droit des gens par la vente des soldats noirs et par la mise à prix des têtes d’officiers blancs. L’opinion la plus accréditée et la seule plausible est que le vice-président Stephens, comptant sur un magnifique triomphe des armes du sud et trompé peut-être par des bulletins de victoire trop pompeux, se mit en route afin de pouvoir dicter un traité de paix au cabinet de Washington à l’instant même où l’avant-garde de Lee se présenterait devant les murs de la capitale.

Quoi qu’il en soit, toutes les espérances que nourrissaient en leur cœur les chefs de la confédération rebelle furent successivement déçues. M. Stephens ne dépassa pas la forteresse Monroe, puis, revenu à Richmond, il y apprit dans tous leurs détails les terribles revers que sa cause venait de subir à quelques jours d’intervalle. Le plan général d’offensive si habilement conçu était entièrement ruiné. Les événemens fâcheux se succédaient coup sûr coup. Gettysburg et le Maryland, Vicksburg et les bords du Mississipi étaient perdus pour les confédérés; le chef de partisans Morgan, qui venait d’envahir l’état libre de l’Ohio, était fait prisonnier avec toute sa bande; les émeutes de New-York finissaient dans le sang et la boue; les copper-heads de l’ouest restaient silencieux; enfin la motion de Roebuck était repoussée par le parlement britannique, et les gouvernemens de l’Europe ne consentaient pas à reconnaître la nouvelle confédération. Depuis le commencement de la guerre, la ligue des plan-