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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/543

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suivant la conception moderne, l’église et toute église, en tant qu’elles n’aspirent point à la domination temporelle, sont libres. Et ce n’est là ni une utopie, ni le simple jeu d’une déduction logique : c’est un ordre de choses passé partiellement en certaines sociétés et complètement en d’autres à l’état de fait. En France, le principe est posé ; mais il n’est encore réalisé qu’en partie, par suite de l’inachèvement de l’œuvre de réorganisation que la révolution nous a léguée. En Angleterre, en dehors de la constitution officielle de l’église, tous les cultes dissidens, qui comprennent peut-être la moitié de la population du royaume-uni, depuis les catholiques d’Irlande jusqu’aux unitairiens des grandes villes industrielles trouvent l’intégrité de la liberté religieuse dans la complète jouissance des libertés politiques. Enfin cette conciliation toute moderne de la liberté religieuse et de la liberté civile est entièrement réalisée aux États-Unis. C’est à l’application totale de ce principe que les événemens et la force des choses sont en train de travailler en Italie et en France. La fin du pouvoir temporel de la papauté est destinée à mettre un terme au système bâtard et inconséquent ; mélange d’idées libérales et de pratiques despotiques, qui régit chez nous les rapports de l’église et de l’état. C’est cet objectif que la presse libérale et démocratique ne doit jamais perdre de vue en France. N’imitons point l’immoral et déplorable exemple que nous a donné en 1852 la presse cléricale. Cette presser qui croyait avoir gagné alors la perpétuelle faveur du pouvoir se réjouissait grossièrement des échecs de la liberté, qui semblaient enchaîner pour toujours ses adversaires. Ne demandons point à des actes de pouvoir une garantie contre les empiétemens de l’église ; sachons bien que nous n’avons contre ces empiétemens d’autre défense loyale, efficace et durable, que la liberté, et que les hommes aussi qui ont contribué par leur politique à l’affranchissement et à la fin du pouvoir temporel de la papauté, s’accoutument à la pensée que nous devons la liberté à l’église libre dans l’état libre, et que la chute du pouvoir temporel doit avoir pour conséquence en France l’inauguration dans leur plénitude de ces libertés politiques qui nous sont marchandées avec une si fatale imprévoyance.

La publication du rapport que le ministre des finances a l’habitude de présenter à l’empereur au moment où les projets de budget sont portés au conseil d’état était cette année attendue avec une grande curiosité. Les incidens politiques qui avaient entraîné de si grosses dépenses extraordinaires avaient donné une teinte assez triste aux rapports des années précédentes. L’an passé par exemple, le découvert avait atteint un chiffre si considérable qu’il fallut faire le pénible aveu de la nécessité d’un emprunt. On augurait mieux de la situation présente, et le rapport de M. Fould a confirmé cette espérance. Grâce à l’emprunt, les découverts sont ramenés à la somme de 660 millions. La dette flottante restera cependant durant quelque temps supérieure à cette somme. Elle s’élève encore à 808 mil-