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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/63

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I.

Dans les mouvemens du sol, il faut distinguer ceux qui sont produits par la pression lente des forces intérieures et ceux que déterminent des causes passagères, telles que la plus ou moins grande abondance d’eau contenue dans les couches superficielles, l’activité de l’évaporation, le drainage, la mise en culture des campagnes. Ainsi les tourbières qui se forment graduellement dans les terrains bas des vallées à la place des lacs et des marais retiennent l’eau dans leurs amas de mousses comme dans une immense éponge, et, se gonflant peu à peu, finissent par s’élever à une hauteur de plusieurs mètres au-dessus de l’ancien niveau du sol. La grande tourbière marécageuse de la Caroline du nord, connue sous le nom de Dismal Swamp, s’est tellement enflée vers son milieu que le chemin de fer de Portsmouth à Suffolk a dû en gravir le versant par une rampe d’environ deux mètres. En revanche, les tourbières que des travaux de drainage ont asséchées s’affaissent graduellement ; les mousses se flétrissent, se tassent et se réduisent en poussière ; on dirait que le sol est lentement aspiré vers l’intérieur de la terre par quelque force secrète.

Du reste, on ne saurait s’étonner de ces phénomènes alternatifs de turgescence et de dégonflement qu’offre le sol tourbeux, puisqu’une simple variation de température suffit pour produire des résultats analogues dans les assises compactes des montagnes. Le jour, les molécules des rochers se dilatent sous l’influence des rayons solaires ; la nuit, elles se refroidissent, se contractent par suite du rayonnement, et la masse totale s’abaisse d’une quantité qui n’est pas toujours inappréciable aux instrumens. Ainsi l’astronome chilien Moesta a pu constater que l’observatoire national du Chili, situé sur la colline de Santa-Lucia, près de Santiago, monte et descend alternativement dans l’espace de vingt-quatre heures : l’oscillation diurne des rochers qui se dilatent et se resserrent tour à tour est même assez considérable pour qu’il soit nécessaire d’introduire cet élément de calcul sans les formules mathématiques consacrées aux observations régulières. Des phénomènes semblables, mais déterminés par des causes différentes, se produisent sous l’observatoire d’Armagh, en Irlande. Après les fortes pluies, la colline qui porte l’édifice s’élève sensiblement ; puis, lorsqu’une évaporation active l’a débarrassée de la trop grande quantité d’eau contenue dans ses pores, elle s’abaisse de nouveau.

Les secousses plus ou moins violentes imprimées au sol dans les contrées volcaniques produisent des changemens de niveau bien supérieurs