Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/754

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
750
REVUE DES DEUX MONDES.

Brins d’osier, brins d’osier.
Courbez-vous, assouplis sous les doigts du vannier.

Et vous serez aussi, brins d’osier, l’humble claie
Où, quand le vieux vannier tombe et meurt, on l’étend,
Tout prêt pour le cercueil. — Son convoi se répand.
Le soir, dans les sentiers où verdit l’oseraie.

Brins d’osier, brins d’osier,
Courbez-vous, assouplis sous les doigts du vannier.


VI. — VERONICA.


Tandis que l’hiver à ma porte
Se lamente, un songe m’emporte
Vers le gai printemps d’autrefois.
Et le souvenir fait revivre
Sur mes vitres blanches de givre
Nos promenades dans les bois.

Et sous les arcades lointaines
Des bouleaux penchés et des frênes
Que berce le vent du matin,
Je crois revoir l’enchanteresse
Qui garde depuis ma jeunesse
Mon cœur dans sa mignonne main.

À l’époque où le muguet pousse,
— Ô souvenance triste et douce ! —
Un jour, à travers la forêt.
Nous cheminions. La tourterelle
Chantait, et mon amour, comme elle.
Au fond de mon cœur soupirait.

Nos pas erraient à l’aventure.
Tout autour de nous, la nature
Paraissait prise d’un frisson :
Les hêtres inclinaient leurs branches,
Et sur leurs tiges les pervenches
Se haussaient le long du buisson.

Au bord des étangs solitaires,
En la voyant, les salicaires
Semblaient se réveiller soudain
Et se répéter à voix basse :
« Voici la jeunesse et la grâce
Qui s’avancent dans le chemin. »