l’ouverture et le grand finale, portent l’empreinte du lion. Ce que j’en dis n’est pas pour engager le théâtre de l’Opéra-Comique à reprendre une partition dont la pièce, par son sentimentalisme pleurard et sa boursouflure solennelle, ne saurait chez nous désormais prêter qu’à la parodie. J’ai voulu simplement insister sur ce côté sérieux, élevé, d’un genre qu’on s’applique trop souvent à ravaler, et qui, très varié dans ses productions, très capable à la fois de s’étendre et de se restreindre, donnait dès l’origine, dans le Tableau parlant et Joseph, dans l’Irato et dans Médée, des témoignages caractéristiques de sa double tendance.
Un répertoire où l’auteur de Fidelio trouve ainsi du premier coup de quoi se prendre mérite qu’en dépit des mille niaiseries débitées à la gloire du genre dit national, les esprits curieux s’en préoccupent musicalement. Notons que ce qui se passait à l’époque de Beethoven à propos des Deux Journées de Cherubini arrivait encore hier à propos du Zampa d’Hérold. M. Verdi n’est certes point un Beethoven, cela se conçoit sans peine; cependant l’opinion de l’homme qui a écrit le Trovatore et Rigoletto, quand elle s’applique à une œuvre dramatique contemporaine, a bien son intérêt, et si cette opinion, ce sentiment est de l’enthousiasme, on en conclura peut-être qu’il fallait autre chose que des ariettes pour remuer ainsi jusqu’aux moelles un dramaturge de ce tempérament. A l’une des reprises de Zampa, M. Verdi assistait donc, entendant pour la première fois la partition d’Hérold. Ce fut comme une révélation. Dès l’ouverture, cette musique exerça son action sur la nature âpre et violente du célèbre Italien, qui, de plus en plus ému, attendri, passionné, s’écriait presque en larmes et d’une voix qui portait en elle l’accent généreux, sympathique, de la plus sincère, de la plus profonde conviction : « Mais c’est admirable! c’est sublime! quel maître vous avez là! » Oui, vraiment, un maître, mais d’une organisation très complexe, et par cela même très française, un Bellini qui s’entend à l’instrumentation comme Weber s’y entendait, presque un Weber avec moins de naturalisme et plus de sensibilité. Des larmes, des soupirs, des élégies comme dans les Puritains, de la passion, du mouvement, de la terreur comme dans Don Juan, tout cela mêlé, amalgamé, confondu sous le souffle du grand ouragan rossinien, qui à cette époque de l’histoire musicale enveloppe, croise, féconde tout. Hérold adorait Rossini ; ce jour nouveau l’éblouissait. A lui, comme à la plupart des représentans de la jeune école française, tant d’éclat et de lumière semblait quelque chose de merveilleux. Seuls, les vieillards, Berton et autres, protestaient, maugréaient à l’écart, chats-huans effarés qui prenaient l’aurore pour un incendie; mais la sympathique, la vivante jeunesse, comment n’eût-elle pas répondu à cet appel, salué de cris joyeux cette féerie? comment n’eût-elle pas battu des mains à l’illumination de ce palais enchanté du génie tout embrasé de flammes du Bengale, tout fulminant d’irradiations volcaniques, de multicolores phosphorescences répandues dans l’air à profusion par des pots de